Manuel Martin
Le pont sur l’Oder près de Küstrin, plusieurs fois primé, est soutenu par un arc en réseau avec des câbles en carbone précontraints. Ces éléments de traction ultralégers et extrêmement stables en plastique renforcé de fibres de carbone (PRFC) ont été en grande partie développés, testés et évalués à l’Empa.
Un arc en réseau d’un blanc éclatant d’une portée de 130 mètres soutient le nouveau pont frontalier près de Küstrin. 88 suspentes en carbone stabilisent la construction filigrane au-dessus de l’Oder. C’est la première fois au monde que de tels éléments de traction en plastique renforcé de fibres de carbone (PRFC) sont utilisés pour un pont ferroviaire. Ils ont été développés par Carbo-Link, une spin-off de l’Empa, puis testés et évalués par l’Empa. Ce nouveau matériau permet non seulement une construction particulièrement efficace en termes de matériaux, mais réduit également considérablement les émissions de CO₂ par rapport à une construction traditionnelle en acier. Cette construction novatrice a valu au pont deux distinctions : le « Bridges International Award » britannique et le prix allemand de la construction de ponts.
Du carbone léger à la place d’acier pesant plusieurs tonnes
Selon le jury du Prix allemand de la construction de ponts, le pont sur l’Oder à Küstrin n’est pas seulement considéré comme un chef-d’œuvre d’ingénierie, mais il est également novateur sur le plan économique et en termes de durabilité. Les 88 suspentes en carbone réduisent considérablement le poids propre par rapport aux suspentes traditionnelles en acier plat. En effet, le PRFC offre une résistance à la traction élevée et une meilleure résistance à la fatigue que l’acier, tout en étant nettement plus léger. Cela ouvre de nouvelles libertés de conception, comme le montre de manière impressionnante l’aspect aérien et transparent du pont sur l’Oder. De plus, l’économie de matériaux réduit les coûts de construction et diminue les frais d’entretien à long terme.
Au total, l’utilisation de suspentes en PRFC a permis d’économiser environ 500 tonnes d’acier et 1 350 tonnes de béton armé dans la structure porteuse globale du pont. Une étude de durabilité réalisée par Urs Meier, pionnier du PRFC et ancien membre de la direction de l’Empa, montre que la version en carbone permet d’économiser environ 20 % des émissions de CO₂ par rapport à une construction en acier.

Exigences élevées pour le pont ferroviaire
Le pont ferroviaire sur l’Oder est un pont en arc à deux voies de construction composite, équipé de suspentes en PRFC précontraintes. Si de tels câbles en carbone ont déjà été utilisés pour un autre pont, c’est ici la première fois au monde qu’ils sont utilisés pour le transport ferroviaire de marchandises lourdes. Les trains peuvent désormais traverser l’ouvrage à une vitesse pouvant atteindre 120 km/h, ce qui a nécessité des tests approfondis et des procédures d’autorisation complexes.
Selon Lorenz Haspel, chef de projet responsable au bureau d’études schlaich bergermann partner, ce pont en carbone n’aurait pas pu voir le jour sans l’Empa. Les nouveaux haubans en PRFC proviennent de la spin-off de l’Empa Carbo-Link à Fehraltorf, fondée par Andreas Winistörfer, PDG et ancien doctorant de l’Empa, et ont déjà été utilisés pour la deuxième fois dans un pont en arc en réseau. « Pour le pont ferroviaire urbain de Stuttgart, nous avons utilisé pour la première fois ces câbles en carbone comme éléments de traction hautement sollicités dans un arc en réseau », indique Lorenz Haspel.
Les essais de fatigue pour le pont sur l’Oder ont été réalisés en grande partie par une équipe du département « Structural Engineering » de l’Empa, sous la direction de Robert Widmann et Dimitri Ott, dans le hall de construction de l’Empa, confirmant ainsi la résistance nécessaire du nouveau matériau CFRP. Giovanni Terrasi, directeur du département « Mechanical Systems Engineering » de l’Empa, a également rédigé, en collaboration avec Christian Affolter, le rapport technique pour le pont désormais primé.
« Nous avons ainsi jeté les bases d’une nouvelle génération de ponts en arc filigranes avec des suspentes en carbone comme éléments porteurs », affirme pour conclure Giovanni Terrasi avec conviction.
Source : EMPA