Dans quelques semaines, le mystérieux 3I/ATLAS atteindra son périhélie, le point le plus proche du Soleil de sa trajectoire, à environ 203 millions de kilomètres de notre étoile. Le troisième objet interstellaire détecté par l’humanité soulève une question majeure : va-t-il se fragmenter sous l’effet de la chaleur solaire, comme le ferait une comète ordinaire, ou révélera-t-il une autre nature ? Dans un billet publié le 10 octobre, Avi Loeb, astrophysicien à l’Université Harvard appelle une nouvelle fois la communauté scientifique à une vigilance accrue durant les prochains mois.
Jusqu’à présent, aucun petit objet n’a été clairement associé à 3I/ATLAS dans les ensembles de données astronomiques disponibles. Les dernières images diffusées par l’ExoMars TGO de l’Agence spatiale européenne montrent des caractéristiques floues autour de 3I/ATLAS, mais elles s’apparentent davantage à des artefacts de bruit qu’à de véritables fragments. Les clichés révèlent également des comètes contemporaines sans lien avec l’objet, des étoiles d’arrière-plan ainsi que les lunes martiennes Phobos et Deimos, mais aucun débris avéré provenant de 3I/ATLAS n’a été confirmé.
L’absence d’objets secondaires resterait pour le moins suspect. Tout fragment potentiel détecté par les orbiteurs martiens ou les télescopes terrestres, tout comme toute nouvelle activité d’objets non identifiés dans l’atmosphère terrestre actuellement surveillée par les observatoires du projet Galileo serait d’un intérêt majeur pour déchiffrer la véritable nature de 3I/ATLAS .
La fragmentation des comètes, un phénomène imprévisible
Si 3I/ATLAS s’avère être une comète d’origine naturelle, sa désintégration en fragments multiples demeure une possibilité réelle à mesure qu’il se rapproche du Soleil. Selon Avi Loeb, les comètes se désintègrent principalement sous l’effet du chauffage solaire, mais parfois aussi en raison des marées gravitationnelles et du stress rotationnel causé par le dégazage. Le chercheur précise toutefois que la rupture d’une comète en multiples fragments reste difficile à prévoir sans connaître en détail sa composition et sa résistance matérielle.
L’astrophysicien rappelle également que les études menées sur des comètes comme 67P/Churyumov-Gerasimenko ont révélé qu’elles pourraient s’être formées à partir de morceaux plus petits qui se sont doucement agglomérés, donnant naissance à une structure mal cimentée, criblée de fractures internes qui rendent ces objets vulnérables aux ruptures. Lorsqu’une comète s’approche du Soleil, explique-t-il, le rayonnement solaire réchauffe son noyau glacé, provoquant la sublimation directe de glaces volatiles comme le dioxyde de carbone, le monoxyde de carbone ou l’eau, emportant avec elles poussières et petites roches.
D’autres mécanismes destructeurs
Les jets de gaz sublimé ne se répartissent pas uniformément à la surface de la comète et agissent comme des propulseurs, accélérant la rotation du noyau, souligne encore Avi Loeb. Leur rotation rapide pourrait également provoquer la fragmentation de l’objet, comme ce fut le cas pour la comète 332P/Ikeya-Murakami, dont la désintégration a probablement été causée par sa rotation excessive. Le scientifique cite également la rupture par marées gravitationnelles, spectaculairement démontrée en 1994, lorsque les fragments de la comète Shoemaker-Levy 9, déchiquetée par la gravité jovienne, se sont écrasés sur Jupiter.
Mais l’astrophysicien de Harvard, fidèle à sa réputation de chercheur aux hypothèses iconoclastes, n’écarte pas une autre possibilité. Il suggère que des sondes de masse réduite nécessiteraient moins d’énergie pour des manœuvres qui visent l’exploration ou l’auto-réplication en de nombreux endroits à la fois.
Une fenêtre d’observation décisive
Peu après que 3I/ATLAS aura atteint son périhélie le 29 octobre 2025, il deviendra observable par la sonde Jupiter Icy Moons Explorer (Juice) de l’Agence spatiale européenne durant le mois de novembre. Toujours d’après Avi Loeb, en novembre et décembre, les observatoires terrestres pourront également surveiller 3I/ATLAS et vérifier s’il se désintègre comme une comète naturelle.
Les prochains mois s’annoncent donc décisifs pour percer le mystère de cet objet venu d’ailleurs. Qu’il s’agisse d’une comète fragmentée ou d’autre chose d’entièrement inédit, 3I/ATLAS continue de nourrir la question qui hante l’humanité depuis des millénaires « sommes-nous seuls dans l’univers ? »
Source : Avi Loeb