Au cours des débats sur la pollution atmosphérique par les voitures, une technologie a fait progressivement parler d’elle ces dernières décennies : la pile à combustible à hydrogène.
Cette technologie possède de nombreux avantages, dont son respect de l’environnement : la pile à combustible n’émet que de l’eau. Malgré cela, les coûts et les développements techniques encore à réaliser freinent fortement son utilisation par le grand public. Alcimed a étudié la façon dont la pile à combustible à hydrogène tente de se faire une place sur le marché, afin d’atteindre un objectif ambitieux : l’automobile, marché qui, au vu des freins actuels, ne semble atteignable qu’à l’horizon 2030.
Les atouts de la pile à combustible
La pile possède avant tout un intérêt environnemental : les sous-produits engendrés sont totalement non-polluants (eau et chaleur). En plus de ces qualités environnementales, plusieurs autres atouts avaient été mis en évidence. Tout d’abord, la diversité des sources de production de ce gaz permet d’envisager une stabilité plus importante des prix que pour les carburants traditionnels. De plus, l’hydrogène constitue un vecteur énergétique stockable, contrairement à l’électricité.
Mais ce n’est pas tout ! La pile à hydrogène est silencieuse et délivre un courant de très bonne qualité. Tel n’est pas le cas de nombreux groupes électrogènes, qui font, en outre, fréquemment l’objet de vols. De plus, l’autodécharge et les temps de recharge des batteries, qui peuvent être contraignants, sont évités avec la pile. Quant aux énergies solaire et éolienne, il va de soi que la dépendance aux conditions climatiques reste un réel inconvénient, ce qui n’est pas le cas avec la pile.
Plusieurs types de piles à combustible existent. Le carburant peut être stocké sous forme d’hydrogène, ou encore sous forme de méthanol ou d’éthanol,… reformé sur place pour produire de l’hydrogène. Nous nous consacrerons ici plus spécifiquement aux piles utilisant directement de l’hydrogène.
Les associations et le programme H2E
Pour soutenir le développement de la technologie ainsi que la mise en place et la consolidation de la filière hydrogène, de nombreuses associations se sont créées : en Europe, le FCH (Fuel Cells & Hydrogen), dont la commission européenne est membre et la EHA (European Hydrogen Association), aux Etats-Unis, la NHA (National Hydrogen Association). Elles se sont notamment fixé pour objectif de contribuer au développement de la technologie et à l’accélération de sa commercialisation. Ces objectifs sont poursuivis à travers le financement de projets de recherche, de démonstrateurs, par le lancement d’appels à projets, ou par des actions de communication auprès du public.
Parmi les projets soutenus, le programme Horizon Hydrogène Energie (H2E) s’est vu accorder en octobre 2008 un financement de 67,6 millions d’euros par la Commission Européenne. Ce programme représente un investissement total de près de 200 millions d’euros sur 7 ans. Il rassemble une vingtaine d’industriels, PME et des laboratoires de recherche publics français. L’objectif est de construire et de consolider la filière hydrogène-énergie. Les actions se porteront à la fois sur le développement de technologies (notamment de production et de stockage de l’hydrogène), sur le cadre règlementaire et sur des interventions auprès du grand public.
Une technologie qui fait rêver les constructeurs automobiles
La pile à hydrogène apparaît comme une solution très intéressante pour les utilisateurs et les constructeurs automobiles : la technologie rend envisageable l’idée d’une voiture totalement non polluante. « Le secteur automobile constitue un objectif très attractif pour les gaziers et les fabricants de piles à combustible à hydrogène puisqu’il représente un défi technologique à relever, mais surtout un important marché à conquérir. Pourtant, des coûts encore trop élevés, un stockage encore trop encombrant ainsi qu’une difficile acceptation du public face à ce nouveau mode de fonctionnement, ne font de l’automobile un marché envisageable qu’à long terme », précise Jean-Philippe Tridant-Bel, directeur de l’activité Energie et Environnement d’Alcimed.
Les applications actuelles de la pile à hydrogène
C’est pourquoi, avant de se lancer sur le marché de l’automobile, les promoteurs de la pile à combustible s’intéressent à d’autres applications d’alimentation électrique :
- parmi les applications stationnaires : les systèmes de secours électriques et l’alimentation d’équipements en sites isolés;
- au sein des applications portables : les générateurs électriques portables et l’alimentation de matériel militaire, d’ordinateurs ou de téléphones portables ;
- et parmi les transports : les véhicules spéciaux (les chariots élévateurs, les équipements d’aéroport…) et les « mini transports » destinés au grand public (voitures de golf, fauteuils roulants, scooters…).
Ces marchés précurseurs vont permettre aux promoteurs de multiplier les expériences et de consolider les connaissances sur une technologie encore récente sur le marché. Ce déploiement leur permettra ainsi d’apporter les améliorations techniques nécessaires à l’utilisation de la pile à combustible à hydrogène dans les voitures, tout en diminuant les coûts. Le développement des piles à hydrogène sur ces marchés est également un moyen indispensable de sensibiliser le public à la technologie et aux contraintes liées au stockage de l’hydrogène (en termes d’encombrement et de sécurité).
Des offres sont d’ores et déjà disponibles sur le marché. Sur les applications stationnaires, des piles sont en vente pour le secours de systèmes critiques nécessitant une alimentation électrique de remplacement en cas de défaillance du réseau. C’est le cas pour des systèmes informatiques ou les télécommunications. Des générateurs électriques à hydrogène portables existent pour les campings cars.
Ces dix dernières années, le secteur des transports a vu se mettre en place de nombreux projets et démonstrateurs. Des piles sont déjà disponibles pour des vélos, des scooters, des fauteuils roulants, des bus… Des programmes se mettent en place par exemple l’aéroport de Munich a lancé en 1997 un programme visant à utiliser de l’hydrogène dans certains de ses bus et chariots élévateurs. D’autres projets permettent de sensibiliser le public à la nouvelle filière qui se met en place. Le projet Hychain lancé en 2006 en Europe en est un exemple. L’objectif est de permettre à des utilisateurs de tester des scooters, tricycles, fauteuils roulants, petits véhicules utilitaires et minibus alimentés par une pile à hydrogène.
Parmi les fabricants, on compte notamment les canadiens Ballard et Hydrogenics, les américains Plug Power et IdaTech, ainsi qu’Axane en France, filiale du groupe Air Liquide. En 1994, le premier prototype de Daimler Chrysler a démontré la viabilité technologique de la pile à combustible dans le domaine automobile. Depuis, les constructeurs automobiles tels que BMW, Mercedes, Volkswagen, Ford et General Motors ont chacun lancé des prototypes dans ce domaine. Récemment, Toyota a présenté son prototype 5 FCHV-Adv lors du salon de Genève.
Les freins au développement et au déploiement de la technologie
Malgré la multiplication des démonstrateurs, des développements techniques sont encore attendus concernant le stockage de l’hydrogène et la durée de vie des membranes utilisées dans les cellules électrochimiques. Ces améliorations sont indispensables, d’autant plus que les technologies concurrentes, telles que les batteries lithium-ions, font elles-mêmes l’objet d’innovations continues.
Par ailleurs, son coût reste aujourd’hui très élevé. D’une part, la membrane et le catalyseur en platine nécessaires à la pile sont très onéreux ; d’autre part, la production et la distribution d’hydrogène sont coûteuses.
Enfin, un des obstacles que la pile devra affronter, et non des moindres, reste la sécurité. En effet, si certains constructeurs assurent que leurs équipements sont parfaitement sécurisés, c’est avant tout la confiance des utilisateurs qu’il faudra acquérir.
De l’hydrogène dans nos voitures en 2030 ?
Si les obstacles à l’entrée de la technologie sur le marché existent, nombreux sont les efforts mis sur la pile à hydrogène. D’après le FCH, le but est d’introduire la pile dans l’automobile d’ici 2015-2020. Mais le chemin semble actuellement difficile à suivre. Il faudra attendre 2030 pour commercialiser des voitures à hydrogène. « La pile à combustible alimentée en hydrogène doit donc avant tout se faire une place auprès des autres technologies sur les marchés déjà identifiés, avant de pouvoir se lancer sur le marché de l’automobile », explique Alexandre Graët, consultant au sein de la BU Chimie et Matériaux d’Alcimed. La question reste alors en suspens : la pile réussira-t-elle à s’imposer sous les carrosseries automobiles et surtout dans combien de temps ?
[ Credit image : Jean Cassanet ]
« De plus, l’hydrogène constitue un vecteur énergétique stockable, contrairement à l’électricité. » Oui sauf que pour le produire il faut de l’électricité aussi. A moins de craquer du gaz nat mais dans ce cas autant faire rouler les bagnoles au gaz directement.
Aujourd’hui, la production de l’hydrogène se fait par reformage du méthane (gaz naturel)et ainsi pour une tonne d’hydrogène il y a émission de 9 à 10 tonnes de CO2. Donc quid de la production propre et économique de l’hydrogène nécessaire aux voitures électriques?
Pourquoi on n’entend pas de travaux sur ces réformeurs capable de « craquer » de l’Ethanol ou tout autre hydrocarbure pour en tirer l’hydrogène ? On en avait entendu parler il y a quelques temps et puis… plus rien… Y a t il une limite technologique à cette voie ?
« Faire rouler les bagnoles au gaz directement » implique l’utilisation d’un moteur thermique (ie. rendement exécrable à mauvais + consommation importante à l’arrêt + pollution urbaine) L’utilisation de l’hydrogène (même issu du reformage de gaz nat.) en pile à combustible embarquée permet de passer en motorisation électrique => plus de consomation à l’arrêt et réduction de la pollution urbaine (il ne reste plus que l’émission de particules des pneus). Coté rendement c’est plus mitijé : les pertes liées à l’ajout des étapes de reformage et « combustion dans la pile » sont à mettre en balance avec les gains du passage moteur thermique -> moteur électrique.
De nombreux verrous technologiques vont bientôt sauter. Le platine pourrait voir sont utilisation baisser de 80 % par une nouvelle technique de micronisation du catalyseur voire disparaitre totalement par l’apparition d’autres catalyseurs. L’augmentation de la résistance thermique des membranes (le second verrou ) pourrait sauter lui aussi par l’apparition de nouvelles membranes , ce qui permettrait des températures plus élevées et donc une pile plus efficace sous plus petit volume avec des catalyseurs moins performants et un refroidissement plus facile (par simple convection). On peut aussi envisager de convertir directement le gaz naturel en électricité dans les piles bloom /énergie à haute température (1000 degré) qui existent déja en grosses uniités en usage stationnaire avec un rendement de conversion de 50% . Pour la production , les rendements peuvent être largement améliorés par les nouvelles techniques d’électrolyse à haute température et haute pression (mises au point par le cea avec areva) dans les centrales solaires thermiques (à concentration ) ou dans les centrales nucléaires actuelles (une baisse de la température de craquage à 500° a pu être obtenue si l’on y rajoute un peu d’électrolyse protonique sous forte pression ). On peut aussi envisager la production d’hydrogène à la maison et se dispenser des problèmes de transport et de distribution (les electrolyseurs domestiques avec un rendement correct existent déjà ) Les perspectives de développement massif ne sont cependant pas encore réunies sauf peut être en usage hybride : batteries + prolongateur d’autonomie par une pile à combustible de faible puissance ( 15kw au lieu des unités de 80 à 100 kw utilisées par les prototypes actuels)
Il faudrait préciser quel type de pile à combustilbe. Certaines technologies rejette de l’eau ET du CO2. Le type le plus utilisé actuellement est sans doute la PàC du type membrane à échange de protons et celle là ne rejette que de l’H2O. Il existe 4 moyens de produire de l’hydrogène à l’échelle industrielle: réformage du gaz naturel (sauf que l’hydrogène est utilisé dans les rafineries en priorité), la radiolyse, la thermolyse et l’électrolyse. Ces 3 dernièrs pouvant être combinés dans une centrale nucléaire. Si on s’oriente vers l’électrolyse uniquement, qu’elle centrale utiliser? Charbon, gaz, champs d’éoliennes …?
Je trouve abérrant de vouloir à tout prix trouver de nouvelles formes de production énergétique à grands renfort de recherches alors qu’avec de plus faible moyens et surtout de la réflexion, il est très facile de réduire notre consommation. Ici un site très sympa sur la remise en perspective de différents modes de production d’énergie : http://www.hkw-aero.com et un doc qui affiche un comparatif de différentes sources d’énergies :
Cette technologie de conversion d’énergie et non de production d’énergie n’est pas propre ou sale. Cela dépend de sa fabrication et surtout des procédés utilisés pour obtenir de l’hydrogène. Rien de miraculeux pour ceux qui pensent qu’on a toutes les solutions. C’est un beau défi scientifique et technologique (cf: post de michel123) qui peut avoir des répercutions (très) intéressantes pour l’économie. Il reste cependant un facteur 10 au niveau du prix d’investissement pour être viable (sans parler de la durée de vie). Mais utilisera-t-on l’électrolyse ou le charbon + stockage de CO2 pour produire cet hydrogène ? Pour une démocratisation et une utilisation du véhicule individuel équivalente à aujourd’hui? J’ai mon idée, et le résultat n’aurait rien d’écolo, de vert ou autre adjectif.
L’article parle de 2030, pourtant la production de série et la commercialisation devrait commencer en 2015 en Allemagne à travers le programme H2Mobility et l’accord signé en septembre dernier par Daimler, Linde, EnBW, NOW, OMV, Shell, la filiale allemande de Total et Vattenfall… cf: Il semble que nos constructeurs automobiles nationaux soient très réticents (ou incompétents?) sur le sujet de l’hydrogène mais je doute que ces 8 sociétés majeures décident d’appuyer sur l’accélérateur sans avoir de très bonnes raisons. Nous avons appris à beaucoup critiquer en France les technologies qui viennent d’ailleurs, pour finalement les adopter comme tout le monde: solaire, éolien, cogénération, etc… pendant des années toutes les excuses étaient bonnes pour dire que c’était trop ceci, trop cela, et finalement ces marchés sont en très forte croissance et nous ne produisons rien en France… L’hydrogène est un des rares domaines énergétiques qui offre encore autant de champs d’applications et sur lequel les options sont encore très ouvertes en matière d’innovations. Je pense que bon nombre des verrous évoqués dans ce forum et dans l’article représentaient des facteurs bloquants il y a 5 ans mais ont été largement levés entre temps (pas par nos industries nationales malheureusement). La question des coûts est très similaire à celle des véhicules à batteries, mais l’autonomie, la flexibilité d’utilisation et la valeur ajoutée de cette solution de transport est bien plus attractive… Au final, la question est de savoir si nous importerons des véhicules à hydrogène d’allemagne ou si les allemands importeront des véhicules à batteries français? Le récent accord signé entre Daimler et Renault suggère peut être les deux, dans tous les cas bien avant 2030…
« Nous avons appris à beaucoup critiquer en France » C’est qu’en FRANCE on n’a pas de pétrole mais on a des idées.