Les matériaux de construction traditionnels pourraient bientôt être supplantés par une innovation surprenante : une mousse à base de bois capable de « respirer » de manière autonome. Un consortium de chercheurs européens s’apprête à démontrer le potentiel révolutionnaire de ce matériau composé à 90% d’air pour l’industrie du bâtiment.
L’industrie du bâtiment est actuellement responsable d’environ 40% des émissions mondiales annuelles de gaz à effet de serre. Face à cet enjeu environnemental majeur, une équipe de chercheurs finlandais, allemands et italiens propose une alternative innovante : l’Archibiofoam. Ce projet ambitieux vise à développer des façades extérieures dotées d’ouvertures semblables à des hublots, capables de s’ouvrir et de se fermer en réaction aux conditions environnementales.
Juha Koivisto, chercheur à l’Université Aalto en Finlande, indique : «Nous allons démontrer non seulement que la mousse à base de bois peut remplacer les matériaux traditionnels, mais aussi qu’elle possède la capacité unique de réagir aux facteurs environnementaux tels que la chaleur et l’humidité pour permettre le chauffage et le refroidissement passifs des bâtiments – une amélioration de l’empreinte carbone des infrastructures existantes de plusieurs ordres de grandeur.»
Des propriétés mécaniques comparables au béton
Malgré sa composition à 90% d’air, la mousse biosourcée présente des caractéristiques mécaniques similaires à celles du béton, de l’acier ou du verre. L’avantage majeur réside dans son caractère biodégradable et son adhésion aux principes de l’économie circulaire.
«La communauté scientifique sait depuis un certain temps que l’intégrité structurelle de ces biomousses est compétitive avec d’autres matériaux de construction, mais leur potentiel n’a pas été testé à son maximum.» ajoute Juha Koivisto.
Le projet Archibiofoam bénéficie d’une subvention de 3,4 millions d’euros du Conseil européen de l’innovation. L’objectif principal est de démontrer l’efficacité de ce matériau innovant comme alternative viable aux matériaux de construction conventionnels.
L’impression 4D au service de l’architecture adaptative
L’équipe de l’Université de Stuttgart, dirigée par Tiffany Cheng, apporte son expertise en robotique pour optimiser l’impression 4D de la mousse. Cette technologie d’impression avancée permet de programmer les objets imprimés afin qu’ils se transforment de manière autonome en réponse aux stimuli environnementaux.
Tiffany Cheng explique pour sa part : «La fabrication additive robotisée est particulièrement bien adaptée pour structurer les matériaux à haute résolution, libérant ainsi le potentiel de performance des biomousses à base de bois à grande échelle. En adaptant le système mono-matériau grâce à notre processus de fabrication, nous visons à répondre aux multiples exigences fonctionnelles des composants de construction, telles que la capacité de charge et le changement de forme pour une ventilation adaptative.»
Un logiciel de modélisation 3D pour optimiser la conception
Le professeur Stefano Zapperi de l’Université de Milan apporte son expertise dans la génération automatique de modèles numériques 3D. Son équipe développe un logiciel propriétaire capable de spécifier les paramètres de conception prioritaires pour les algorithmes, tels que la sensibilité à la chaleur et à l’humidité, afin d’obtenir les résultats les plus contrôlables.
Stefano Zapperi déclare également : «Nous assistons actuellement à une révolution dans la conception structurelle grâce à des algorithmes capables de trouver la géométrie la plus efficace pour une fonction souhaitée, comme la programmation des changements de forme sous des stimuli externes. Tout au long du projet Archibiofoam, nous prévoyons d’étendre les capacités de notre logiciel et de l’adapter aux caractéristiques physiques de la biomousse et aux besoins du secteur du bâtiment.»
Un potentiel industriel prometteur
Bien que le projet de preuve de concept s’étale sur trois ans, la recherche sur le matériau de base a débuté il y a plus d’une décennie, initialement comme matériau d’emballage respectueux de l’environnement. Woamy, partenaire industriel du projet, a déjà développé une activité autour de la technologie des biomousses.
Susanna Partanen, PDG de Woamy, annonce pour conclure : «En tant que spin-off de l’Université Aalto, Woamy est à l’avant-garde du développement de cette nouvelle technologie de biomousse. Nos racines profondes dans cette innovation sont vitales pour donner vie au projet Archibiofoam. Grâce à cette collaboration et en tirant parti de notre expertise, nous visons à montrer comment la biomousse Woamy peut non seulement transformer l’industrie de l’emballage, mais aussi l’industrie de la construction.»
Légende illustration : La mousse de cellulose sert de base à la dynamique passive, c’est-à-dire au mouvement sans apport d’énergie traditionnel. Les réactions à l’humidité et aux changements de température sont converties en mouvements dirigés, tels que l’ouverture et la fermeture des bouches d’air conditionné ou l’occultation de la lumière du soleil.