Avion

Pourtant, il ne représente qu’entre 2 et 3% des émissions de gaz à effet de serre, moins que le transport maritime, soit dit au passage. Il y aurait mieux à faire que d’embêter le petit monde de l’aéronautique, qui fait d’ailleurs de gros efforts de modernisation de ses flottes. Les appareils ne consomment aujourd’hui 4 litres pour cent kilomètre parcourus par un passager, et ce sera bientôt 3 avec les prochaines générations d’appareils. Les grands constructeurs aéronautiques travaillent à la mise au point de nouveaux carburants à base d’algues pour diviser par deux leur contribution à l’effet de serre, et font des essais de moteurs alimentés par une pile à combustible.

Et en plus, les transports aériens sont les seuls à s’équilibrer financièrement. Pas de crédits publics comme pour les routes ou les chemins de fer, ce sont les taxes payées par les passagers qui paient les infrastructures. Les billets ne sont pas non plus subventionnés comme dans le train. Il est vrai que l’aviation échappe à la taxe sur le CO², mais pour peu de temps, car elle sera intégrée dès 2011 dans le système communautaire d’échange de quotas d’émissions de gaz à effet de serre. Alors, pourquoi aller embêter ces gens là ?

La part des émissions est modeste, mais il faut comparer à celle de l’aviation civile dans le PNB mondial : 0,6%. Ajoutons que le transport aérien se développe, que les émissions de gaz à effet de serre ont doublé depuis 1990, date de référence du protocole de Kyoto, alors que l’objectif est de les réduire de 8% d’ici 2010. Malgré des efforts des avionneurs, la croissance continue du trafic conduirait à un triplement des émissions d’ici 2050, alors que, nous le savons, il faudrait d’ici là les diviser par quatre. Un grand écart difficile à justifier si on limite le champ de l’observation au strict transport aérien. Une première mesure pourrait consister en une information systématique du voyageur sur ses émissions de gaz à effet de serre, évoquée ci-dessus, juste pour que chacun évalue l’impact de ses décisions, et puisse éventuellement comparer plusieurs choix.

La pollution la plus faible est cependant excessive si elle ne répond à aucun besoin.

Il faut revenir à l’utilité des choses, en l’occurrence d’un voyage en avion. Mis à part quelques vols de découverte, pour le plaisir de voler et de découvrir la terre vue du ciel, l’essentiel des vols présente une utilité sociale ou économique. La bonne manière de poser la question n’est donc pas l’évaluation du coût environnemental du déplacement, mais celle du coût de l’activité dont il n’est qu’une composante. Quel est la contribution à l’effet de serre par rapport au service rendu, à la richesse produite. Bien sûr, ce ratio offre un élément de comparaison et un critère de choix pour le mode de transport, et l’avion se trouvera souvent en concurrence avec d’autres modes de transport, moins gourmands en énergie et moins polluants. A lui de faire la preuve de son utilité particulière dans les différents cas d’espèce qui se présentent. Cette utilité peut être d’ordre varié, économique, culturelle ou sociale, mais quand il s’agit d’aller déguster des tapas à Gérone pour 39€, comme le propose un voyagiste sur les murs de Paris, on peut douter du caractère « durable » du transport aérien…

Trop souvent, on réduit la question du développement durable de l’aviation aux problèmes posés aux riverains, bruit et pollution notamment. Il est vrai que le développement du transport aérien est encadré par le degré d’acceptation des riverains : on l’a vu à Strasbourg, quand l’action des riverains a empêché DHL de s’installer, on l’a vu quand il a été décidé d’instaurer un couvre-feu à Orly, conséquence d’une action continue des associations et des collectivités voisines. Contrairement aux modes de transports terrestres, chemin de fer, canaux et route, l’avion n’a pas besoin d’infrastructures tout au long de son parcours. Il ne provoque pas d’effet de coupure, avec les impacts écologiques et paysagers qui en découlent. En dehors des grandes villes, et de leurs aéroports saturés, il offre une souplesse d’adaptation du trafic sans avoir à transformer l’infrastructure. Et l’avion est beaucoup plus sûr que la route ! Ce sont de véritables avantages, à ne pas négliger. Au-delà de l’effet de serre, il reste les problèmes locaux, concentrés sur les habitants proches des points de départ et d’arrivée. Le bruit est sans doute la nuisance la plus ressentie, et les réponses (isolation, appareils moins bruyants, modes d’approche et trajectoires mieux adaptés, etc.) sont loin de répondre aux exigences des riverains. Comme pour l’énergie, les avions font des progrès. Chaque génération de moteurs gagne en décibels, et on pense installer prochainement leurs réacteurs au dessus des ailes pour que celle-ci renvoient le bruit vers le ciel au lieu de le rabattre sur la terre. Il y a aussi la pollution de l’air, qui reste significative autour des grands aéroports, et les problèmes d’eau : les grandes plateformes sont lessivées par les pluies et entraînent hydrocarbures et produits de dégivrage vers les rivières, nécessitant ainsi de puissantes stations d’épuration. Bref, ce sont des questions traditionnelles d’environnement, bruit, pollution de l’air et des eaux, qui se trouvent massivement posées autour des aéroports, et dont la résolution conditionne le développement du trafic, même si les aérogares sont HQE [2] et les véhicules de services électriques.

Pour conclure, il ne faut pas oublier les circulations automobiles induites par le transport aérien. Le bruit et la pollution des autoroutes d’accès sont parfois aussi importants que ceux des avions. Là encore, c’est sur toute la filière du voyage qu’il faut faire le bilan.

Notes :

[1] Notez que le voyagiste voyages-sncf.com vous propose de calculer les émissions de gaz à effet de serre de vos voyages (tous modes) et de cotiser à l’association environnementale GoodPlanet pour les compensations que vous aurez à cœur de pratiquer.

[2] HQE : haute qualité environnementale

[ Archive ] – Cet article a été écrit par Dominique Bidou

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