Alors que la demande en services cloud ne cesse de croître, la question de l’impact environnemental des centres de données devient pressante. Face à cette problématique, le fournisseur cloud suisse Infomaniak a inauguré un nouveau centre de données, situé à Genève, qui se distingue par son approche innovante en matière de durabilité et d’efficacité énergétique. Ce projet, déjà opérationnel depuis le 11 novembre dernier, propose une solution concrète pour réduire l’empreinte carbone du secteur tout en répondant aux besoins croissants en infrastructures numériques.
Implanté en sous-sol d’une zone résidentielle genevoise, au cœur de la coopérative participative et écoresponsable de la Bistoquette, ce nouveau centre de données se fond parfaitement dans son environnement. Contrairement aux infrastructures traditionnelles, souvent visibles et énergivores, celui-ci a été conçu pour minimiser son impact sur le paysage tout en maximisant son efficacité énergétique. Dès son entrée en service, il a permis de revaloriser 100% de l’électricité renouvelable locale qu’il consomme.
À pleine capacité, prévue pour 2028, le site injectera 1,7 MW dans le réseau de chaleur de la région, soit l’équivalent de l’énergie nécessaire pour chauffer 6000 ménages de type Minergie-A ou permettre à 20 000 personnes de prendre une douche quotidienne de cinq minutes. Une performance rendue possible grâce à un système de récupération de chaleur innovant, qui transforme l’énergie thermique produite par les serveurs en une ressource utile pour le chauffage urbain.
Une innovation énergétique au service de la transition
Le modèle développé par Infomaniak repose sur une approche circulaire de l’énergie. Contrairement aux centres de données classiques, où la chaleur générée par les serveurs est souvent dissipée dans l’atmosphère, celui-ci intègre un système de récupération intégrale. L’électricité consommée par les équipements est entièrement convertie en chaleur, puis transférée à un échangeur air/eau. Des pompes à chaleur, fabriquées en France par Trane, élèvent ensuite la température de l’eau pour l’intégrer au réseau de chauffage urbain.
« Dans le monde réel, les centres de données transforment de l’énergie électrique en chaleur. Avec la croissance exponentielle du cloud, cette énergie est aujourd’hui gaspillée dans l’atmosphère. Il est urgent de la revaloriser, de connecter ces infrastructures aux réseaux de chauffage et d’adapter les normes de construction », a indiqué Boris Siegenthaler, fondateur et directeur stratégique d’Infomaniak. Cette démarche permet non seulement de réduire les pertes énergétiques, mais aussi de limiter les émissions de CO₂, évitant ainsi la combustion de 3600 tonnes de gaz naturel par an.

Un modèle open source pour une reproduction à grande échelle
L’un des aspects les plus remarquables de ce projet réside dans sa volonté de partage des connaissances. Documenté par des étudiant·e·s de l’EPFL, de l’IMD et de l’Université de Lausanne, le fonctionnement du data center a été rendu open source. Les détails techniques, les performances opérationnelles et les recommandations pour les décideurs politiques sont disponibles sur le site d4project.org. Cette transparence vise à encourager la reproduction du modèle à grande échelle, en démontrant qu’il est possible de concilier performance numérique et durabilité.
« Aujourd’hui, le PUE, qui mesure l’efficacité énergétique des data centers, ne suffit plus face à l’urgence climatique. Il faut aussi prendre en compte l’ERE, qui évalue l’énergie réellement consommée par rapport à celle réutilisée, et l’ERF, qui mesure la part d’énergie totale du data center réutilisée pour d’autres usages, comme le chauffage urbain », a ajouté Boris Siegenthaler. Cette approche holistique pourrait inspirer de nouvelles réglementations dans le secteur.
Un impact économique et environnemental mesurable
Sur le plan financier, la revalorisation de la chaleur fatale représente une opération neutre pour Infomaniak. Le coût total du projet s’élève à 12 millions de francs suisses, dont la moitié a été consacrée à l’adaptation des niveaux de chaleur aux besoins du réseau de chauffage. Soutenu par l’Office cantonal de l’énergie de Genève et l’opérateur SIG, ce modèle économique pourrait servir de référence pour d’autres initiatives similaires.
En parallèle, le choix d’équipements fabriqués en Europe renforce la souveraineté technologique du continent. Des pompes à chaleur françaises aux onduleurs suisses en passant par les panneaux solaires germano-suisses, chaque composant a été sélectionné pour son origine et sa performance. Cette stratégie contribue également à dynamiser l’économie locale, en créant de la valeur pour les entreprises régionales.
Infomaniak ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Deux nouveaux centres de données, basés sur le même principe, sont déjà en projet. Le premier, d’une capacité de 1,1 MW, est prêt à être connecté à un réseau de chaleur, tandis qu’un second, d’au moins 3,3 MW, devrait voir le jour d’ici 2028. « Nous avons déjà 1.1 MW prêts à être injectés dans un réseau de chaleur, et d’ici 2028, un nouveau data center d’au moins 3.3 MW sera nécessaire pour répondre à la demande. Le principe est simple : nous achetons l’électricité localement et offrons gratuitement notre chaleur fatale décarbonée », a précisé Boris Siegenthaler. Une démarche qui pourrait bien inspirer d’autres acteurs du secteur.
Légende illustration : De gauche à droite : Robert Cramer, Président SIG, Xavier Magnin, Maire de Plan-les-Ouates, Antonio Hodgers, Conseiller d’Etat chargé du département du territoire, Julien Bonnat, Datacenter and operation manager chez Infomaniak, Fabienne Monbaron, Conseillère administrative à la Mairie de Plan-les-Ouates, Boris Siegenthaler, fondateur et directeur stratégique d’Infomaniak et Marc Oehler, CEO d’Infomaniak. -crédit infomaniak
Source : CP Infomaniak