Comprendre ce qui se passe à l’intérieur d’un matériau lorsqu’il est frappé par des impulsions lumineuses ultra-courtes est l’un des grands défis de la physique de la matière et de la photonique moderne. Une nouvelle étude publiée dans Nature Photonics et menée par l’École polytechnique de Milan révèle un aspect jusqu’ici négligé mais essentiel, à savoir la contribution des charges virtuelles, des porteurs de charge qui n’existent que lors de l’interaction avec la lumière, mais qui influencent profondément la réponse du matériau.
La recherche, menée en partenariat avec l’université de Tsukuba, l’Institut Max Planck pour la structure et la dynamique de la matière et l’Institut de photonique et de nanotechnologie (Cnr-Ifn), a étudié le comportement de diamants monocristallins soumis à des impulsions lumineuses d’une durée de quelques attosecondes (milliardièmes de milliardième de seconde), à l’aide d’une technique avancée appelée spectroscopie de réflexion transitoire à l’échelle de l’attoseconde.
En comparant les données expérimentales avec des simulations numériques de pointe, les chercheurs ont pu isoler l’effet des transitions verticales dites virtuelles entre les bandes électroniques du matériau. Ce résultat modifie la perspective sur la manière dont la lumière interagit avec les solides, même dans des conditions extrêmes jusqu’alors attribuées uniquement au mouvement des charges réelles.
« Nos travaux montrent que l’excitation des porteurs virtuels, qui se développe en quelques milliardièmes de milliardième de seconde, est indispensable pour prédire correctement la réponse optique rapide dans les solides », déclare Matteo Lucchini, professeur au département de physique, auteur principal de l’étude et associé au CNR-Ifn.

« Ces résultats marquent une étape clé dans le développement des technologies ultra-rapides en électronique », ajoute Rocío Borrego Varillas, chercheuse au CNR-IFN.
Les progrès réalisés offrent de nouvelles perspectives pour la création de dispositifs optiques ultra-rapides, tels que des commutateurs et des modulateurs capables de fonctionner à des fréquences pétahertz, mille fois plus rapides que les dispositifs électroniques actuels. Cela nécessite une compréhension approfondie du comportement des charges réelles et des charges virtuelles, comme le démontre cette étude.
Les recherches ont été menées au Centre de recherche sur l’attoseconde (ARC) du Politecnico di Milano, dans le cadre des projets européens et nationaux ERC AuDACE (Attosecond Dynamics in AdvanCed matErials) et MIUR FARE PHorTUNA (PHase Transition Ultrafast dyNAmics in Mott insulators).
Source : École polytechnique de Milan