Les bâtiments continuent de gaspiller de l’énergie malgré des rénovations coûteuses, alerte un nouveau rapport de KPMG publié récemment. L’étude* affirme que les stratégies classiques de modernisation ne suffisent plus pour atteindre la neutralité carbone en 2050 ; l’intelligence artificielle (IA) couplée à la Gestion stratégique de l’énergie (SEM) offrirait une voie plus rapide et moins onéreuse. Selon KPMG, cette approche permettrait de réduire la consommation de 20% à 30% dès les premières années, contre 5% à 7% pour un SEM isolé. La société lituanienne Exergio assure que ces gains sont déjà observables sur le terrain. Reste à faire évoluer la culture de la gestion énergétique pour transformer l’essai.
KPMG dresse un constat sans appel : même après des remplacements de chaudières, de vitrages ou de pompes à chaleur, une part importante de l’énergie consommée continue de se dissiper. Les auteurs du rapport jugent ces travaux trop lents et trop onéreux pour produire les coupes nécessaires à court terme. Dans un secteur où les bâtiments représentent près de 40% de la demande énergétique mondiale, l’enjeu dépasse largement la simple facture.
SEM + IA : un tandem plus efficace
Le Strategic Energy Management repose sur un cycle permanent avec l’évaluation, la planification, la mise en œuvre, le développement des compétences, le suivi, le tout censé ancrer l’efficacité énergétique dans la gestion quotidienne.
KPMG recommande désormais d’y adjoindre l’IA pour automatiser une partie des réglages et gagner en réactivité. « L’IA permet déjà aux bâtiments de réduire le gaspillage de 20 à 30% dans nos projets, quel que soit le climat ou l’âge du bâtiment », souligne Donatas Karčiauskas, directeur général d’Exergio. L’entreprise connecte ses algorithmes aux systèmes de gestion technique pour ajuster en temps réel chauffage, ventilation et éclairage en fonction de l’occupation et de la météo.
Trois paliers d’action graduelle
On commence par tirer le meilleur parti des équipements déjà en place : il s’agit d’ajuster la climatisation, le chauffage, l’éclairage et l’automatisation pour qu’ils consomment moins sans sacrifier le confort. « C’est actuellement une mission pour l’IA, car nous voulons réaliser des économies plus rapides », résume Donatas Karčiauskas.
La seconde étape, plus visible, consiste à remplacer les appareils vieillissants ( chaudières, ventilateurs ou ampoules énergivores ) par des modèles modernes, conçus pour utiliser moins d’énergie tout en restant performants.
Enfin, lorsque la consommation de base est sous contrôle, il devient pertinent de passer aux énergies renouvelables : installer des panneaux solaires, des petites éoliennes ou signer un contrat d’électricité verte permet alors de verdir durablement l’alimentation du bâtiment.
KPMG insiste sur le fait d’introduire des panneaux solaires ou des batteries avant d’avoir dompté la consommation interne, sinon cela reviendrait en quelque sorte à arroser avec un seau percé. À chaque étape, l’IA sert de vigie. En effet, elle détecte dérives et anomalies, propose des ajustements et alloue les tâches entre machines et responsables techniques.
Des résultats déjà mesurables
Exergio revendique des projets pilotes en Pologne, au Royaume-Uni ou encore à Oman, affichant des baisses de consommation dépassant souvent 25%.
« Mais ces économies ne durent que si elles s’appuient sur une gestion énergétique intelligente. C’est précisément ce que souligne KPMG : l’efficacité n’est pas une mise à niveau ponctuelle, c’est la manière dont on fait fonctionner le bâtiment jour après jour », insiste Donatas Karčiauskas. L’avis semble être partagé par plusieurs experts interrogés par KPMG. La performance dépend moins de nouveaux matériels que de la discipline opérationnelle, soutenue par une analyse de données fine et continue.
L’enjeu serait maintenant de créer, au sein des directions immobilières, un réflexe quotidien d’optimisation, adossé à des indicateurs partagés.
« Ce qui manque, c’est une culture de gestion énergétique active. Le SEM fixe les règles et l’IA fait en sorte que les systèmes s’y tiennent minute après minute, tout en laissant les humains aux commandes », résume Donatas Karčiauskas. Les gestionnaires doivent donc se former à l’interprétation des tableaux de bord, tandis que les régulateurs pourraient accélérer le mouvement en conditionnant les labels verts ou les aides fiscales à l’adoption de SEM assorti d’IA.
En plaçant l’IA au cœur du Strategic Energy Management, KPMG propose une feuille de route pour réduire rapidement l’empreinte carbone de l’immobilier existant. La prochaine étape sera sans doute réglementaire. Plusieurs capitales européennes planchent déjà sur des obligations de performance en temps réel.
* Etude KPMG : « Comment l’IA contribue à l’amélioration l’efficacité énergétique et gestion de l’énergie dans l’immobilier » – version .PDF
Source : Exergio