Pas de miel cette année

J’ai décidé de me mettre à l’apiculture durant l’hiver 2005-2006, pour plusieurs raison : peur et fascination face à ces insectes, intérêt de pouvoir produire du miel, et de plus, le petit rucher fait partie de toute bonne installation en permaculture, les braves insectes étant responsable de la pollinisation d’une bonne partie des fruits et légumes que nous mangeons.

L’apiculture moderne, après en avoir étudié en long et en large les aspects théoriques, m’a étonné par la quantité et la diversité des manipulations à effectuer sur une ruche : changement et déplacement des cadres mobiles, traitements anti-parasitaires, nourrissement artificiel et j’en passe.

En faisant quelques recherches sur Internet, je suis tombé sur les ruches écologiques, et en particulier la ruche de l’Abbé Warré et ses déclinaisons [A]. Leur mode de construction et d’exploitation m’a tout de suite séduit et j’ai décidé de m’y lancer. Les raisons principales étant la simplicité d’exploitation, cette simplicité entrainant bien sûr une diminution de la productivité, mais le bilan final restant en théorie tout de même très intéressant. J’ai même mis en ligne un site dédié à ce type de ruche.

Entre le printemps et l’été 2006 j’ai donc installé mes 4 colonies d’apis mellifera carnica dans 4 ruches neuves amoureusement construites de mes propres mains.

Les débuts furent très prometteurs et passionnants : une fenêtre à l’arrière de chaque hausse permettant de voir ce qui se passe à l’intérieur.

Durant l’été, une première ruche a cessé de croître, j’ai vite découvert que les ouvrières étaient en train d’essayer d’élever une nouvelle reine, mais que diable était-il arrivé à la reine ? Impossible de le savoir, mais ce sont des choses qui peuvent arriver. Malheureusement aucune nouvelle reine n’est venue remplacer l’ancienne.

Durant l’automne, les enfants ont trouvé le cadavre d’une autre reine à côté d’une ruche : fait rarissime et bien sûr inexpliqué.

Au printemps 2007, une des ruches est en activité. Il s’avère que l’autre est vide ! J’espère que la dernière ruche tiendra le coup, mais après quelques semaines, beau temps et fleurs disponibles, il n’y a plus d’abeilles. THE END

Mes collègues apiculteurs ne peuvent m’aider : j’utilise des ruches qu’ils ne connaissent pas et je n’ai pas fait les fameux indispensables traitements anti-varroa.

Le résultat est tout de même très bizarre :

  • Il y a des réserves abondantes de miel et de pollen
  • Il n’y a presque pas de cadavres d’abeille dans les ruches
  • Les ruches vides ne sont pas pillées
  • Il y a très peu de cadavres de varroa au sol

Ca ressemble assez aux symptômes du Colony Collapse Disorder [1], désastre de grande envergure qui a lieu actuellement aux USA mais touchant également la Suisse.

Le plus grave avec cette sorte d’épidémie, à part le fait quand dans certaines régions 100% des colonies disparaissent, est qu’on en comprend pas bien les causes, ou plutôt, il y en a plusieurs : alimentation, éléments pathogènes, pesticides, acariens, OGM et même ondes du téléphone mobile !

Chacun de ces facteurs ne peut expliquer à lui seul cette étrange disparition d’abeilles, mais à eux tous ils peuvent mettre suffisamment de pression pour les détruire.

Il est vrai que depuis que j’ai ces abeilles, j’ai été plus attentif à mon environnement, j’ai remarqué à quel point, dans ma région, les monocultures règnent, à quelle vitesse les rares prairies fleuries sont fauchées, même en montagne, pour nourrir les vaches, à quel rythme les insecticides et fongicides sont pulvérisés.

On entend souvent une citation d’Einstein disant que l’humanité ne survivrait pas 4 ans à la disparition des abeilles. Je ne sais pas si elle est vraie ni si c’est grave à ce point, mais ce dont je suis sûr, c’est que si les abeilles disparaissent à cause d’une dégradation de l’environnement, c’est le signe évident du début de notre longue agonie.

Webographie :
[A] http://ruche-warre.levillage.org/
[B] http://www.ruche-ecologique.org/

Notes :
[1] Syndrome d’effondrement de colonie

[ Archive ] – Cet article a été écrit par Dominique Kuster

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