Projets d’oléoducs au Québec : 20 bonnes raisons de s’abstenir

L’Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (AQLPA) et Greenpeace a dévoilé lundi un imposant rapport technique portant sur les impacts environnementaux et sanitaires de l’arrivée au Québec du pétrole lourd de l’Ouest canadien.

Le rapport intitulé « Ce que vous devez savoir sur la venue du pétrole de l’Ouest au Québec mais que les pétrolières préfèrent que vous ne sachiez pas » collecte les renseignements les plus à jour concernant les risques et les impacts liés aux projets d’oléoducs d’Enbridge et de TransCanada. L’analyse est faite, pour tout le cycle de vie du pétrole, « du puits à la roue », incluant les déchets pétroliers comme le coke de pétrole.

Pour l’AQLPA, ces projets signifient beaucoup plus que l’ajout de quelques tuyaux dans le paysage ou une simple modification de l’utilisation des installations existantes. "La venue du pétrole sale des sables bitumineux condamnerait tous nos efforts de réduction des GES et pourrait rendre caduques nos efforts de contrôle de l’anhydride sulfureux (SO2), principal polluant à l’origine des pluies acides. Le Québec deviendrait l’incinérateur par excellence des déchets pétroliers comme le coke de pétrole, résidu de la production de pétrole de l’ouest" a précisé André Bélisle, président de l’AQLPA.

Projets d'oléoducs au Québec : 20 raisons de s'abstenir

Pour Patrick Bonin, responsable de la campagne Climat-Énergie chez Greenpeace Canada "si le projet d’oléoduc d’Enbridge va de l’avant, Suncor raffinera à Montréal du pétrole lourd des sables bitumineux, et ce, au détriment de la santé des gens et de l’environnement. Ce pétrole est l’un des plus sales de la planète et alourdira le bilan des émissions des raffineries qui sont déjà parmi les plus grands pollueurs du Québec. S’approvisionner en pétrole des sables bitumineux est une des pires choses que le Québec peut faire pour le climat planétaire. La crise climatique exige que l’on se sèvre rapidement de notre dépendance au pétrole, en commençant par les formes de pétrole extrêmement polluantes comme celui des sables bitumineux."

Après analyse des projets d’oléoducs, les deux organisations concluent qu’ils doivent être rejetés par le gouvernement du Québec pour les 20 raisons suivantes:

1- L’eau potable de centaines de milliers, possiblement de millions de personnes incluant Montréal et tout le sud ouest du Québec serait à risque.

2- Le transport de pétrole bitumineux comporte des risques de déversements aux conséquences graves, tant pour l’environnement que pour la santé humaine.

3- En cas de déversements en milieu habité, c’est à un cocktail atmosphérique complexe de produits toxiques auquel les citoyennes et citoyens seraient exposés.

4- En moyenne, les émissions de GES du puits à la roue sont de 14% à 20% plus élevées pour les bruts de pétrole bitumineux canadiens que pour la moyenne pondérée des carburants de transport vendus ou distribués aux Etats-Unis.

5- Pour sa production, un baril de pétrole extrait des sables bitumineux émettrait 3,2 à 4,5 fois plus de GES qu’un baril de pétrole produit aux États-Unis ou au Canada à partir de sources conventionnelles.

6- Les bitumes tirés des gisements de sables pétrolifères de l’Alberta sont très visqueux (40 à 70 fois celle du pétrole brut conventionnel nord-américain) et ont une très haute teneur en soufre (variant de 4,6 à 4,9% soit 5 à 10 fois plus que dans le pétrole conventionnel moyen) ce qui en fait un pétrole «acide», «sulfureux» ou «corrosif».

7- Les émissions atmosphériques provenant du raffinage sont, entre autres, fonction du type de pétrole raffiné, de la densité API, de la teneur en soufre et du type de raffinerie impliquée.

8- En passant d’un pétrole léger à un pétrole lourd, les émissions de GES liées au raffinage pourraient tripler.

9- Les raffineries de Suncor et Ultramar émettent déjà des quantités importantes de contaminants affectant la qualité de l’air et l’arrivée massive du pétrole albertain, plus lourd que le pétrole raffiné jusqu’à présent, augmenterait substantiellement les émissions des raffineries québécoises au moment même où Montréal et le Québec connaissent des problèmes de qualité de l’air.

10- Si le projet d’inversion du flux dans l’oléoduc d’Enbridge va de l’avant, Suncor pourrait construire une unité de cokéfaction à Montréal. Celle-ci augmenterait la quantité de coke de pétrole produite et utilisée au Québec.

Projets d'oléoducs au Québec : 20 raisons de s'abstenir

11- Pour un baril de bitume des sables bitumineux, c’est entre 15 et 30 % qui se retrouvera sous forme de petcoke, selon les procédés de valorisation et de raffinage, beaucoup plus que pour un baril de pétrole conventionnel.

12- Le coke de pétrole est très volatil. Il peut créer des problèmes de santé publique si l’entreposage est inadéquat.

13- Par unité d’énergie produite, comparativement au charbon, «le petcoke émettrait de 5% à 10% plus de CO2.

14- Une tonne de petcoke serait responsable de l’émission de 53,6% plus de CO2 qu’une tonne de charbon tout en se vendant à 25% du prix»[i].

15- Le pétrole albertain étant plus riche en soufre, le résidu du procédé de raffinage, le coke de pétrole, sera conséquemment plus riche en soufre.

16- L’usage de ce coke de pétrole comme combustible entraînera fort probablement des émissions accrues de SO2.

17- Le Québec est déjà le principal marché de consommation pour le coke de pétrole au Canada dépassant largement l’Ontario et l’Alberta réunis.

18- Un projet de cimenterie à Port Daniel en Gaspésie est présentement proposé et pourrait devenir un des, sinon le plus important « incinérateur » à coke de pétrole au Québec, et peut-êtremême en Amérique du Nord.

19- A lui seul ce projet pourrait faire augmenter de 700.000 à 2.000.000 de tonnes de GES (dépendamment de la production), le tout sans évaluation par le Bureau d’audiences publiques en environnement du Québec (BAPE).

20- Plusieurs études démontrent que les retombées économiques des projets d’exploitation du pétrole des sables bitumineux sont marginales dans les provinces autres que l’Alberta.

Projets d'oléoducs au Québec : 20 raisons de s'abstenir

Vue l’ampleur des enjeux, elles considèrent que le gouvernement du Québec doit :

► Mener une véritable évaluation environnementale du projet de pipeline d’Enbridge, incluant toutes les facettes de ce projet dont son impact sur les changements climatiques et les impacts liés au transport du pétrole, à son raffinage, à la production et la consommation du coke de pétrole tout en évaluant sérieusement les alternatives aux projets d’oléoducs. Face à un projet similaire de raffinage du pétrole lourd de l’Alberta, la ville de Benicia en Californie a d’ailleurs exigé une véritable évaluation environnementale qui analysera, entre autres, ce qu’aura comme impacts le changement de types de combustible sur la qualité de l’air et les émissions de GES.

► Adopter dans sa prochaine Politique de mobilité durable une norme sur la teneur en carbone des carburants forçant l’étiquetage et l’approvisionnement en pétrole à faible teneur en carbone et basée sur l’ensemble du cycle de vie (incluant la production, le transport, le raffinage, l’utilisation des résidus comme le petcoke et la combustion finale).
Tenir une évaluation environnementale par le BAPE sur le projet de cimenterie de Port-Daniel qui deviendrait un des plus grands consommateurs de coke de pétrole.

L’AQLPA et Greenpeace participent aux consultations sur les enjeux énergétiques du Québec et déposeront chacun un mémoire. Celui de l’AQLPA a été présenté lundi à Québec et celui de Greenpeace à Montréal le 11 octobre. Les deux organisations insistent pour que le gouvernement québécois, dans sa nouvelle politique énergétique, prenne enfin le virage des énergies vertes et renouvelables de l’avenir et n’investisse pas dans les énergies brunes et redoutables du passé.

>>> Le rapport complet est téléchargeable ici

 

         

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Jacques mignero

Je suis contre l’inversement de l’oléoduc d’Enbridge, car de toute facon ce à quoi il va servir, c’est d’enrichir les compagnies de pétrole, à nous québecois il ne nous rapportera rien , comme je lisais hier ils veulent surtout vendre ce pétrole à la Chine. Par contre c’est le Québec qui à le risque le plus probant de subir un déversement de brut malsain.

Claude b.

Il est temps que le Québec exploite SON pétrole. Car de toute façon, nous avons tous besoin de pétrole.

Claude b.

Il est temps que le Québec exploite SON pétrole. Car de toute façon, nous avons tous besoin de pétrole.

Nicias

Oui aux trains ! Le bilan définitif de l’accident de train de Lac-Mégantic est de 47 morts, a annoncé vendredi 19 juillet la police québécoise, notant que cinq corps n’avaient pas été retrouvés. Le dernier bilan faisait état de 42 corps retrouvés, alors que les autorités évoquaient depuis plusieurs jours “une cinquantaine” de victimes. Deux semaines après qu’un convoi ferroviaire de 72 wagons-citernes a explosé au coeur de la bourgade québécoise, seules 22 dépouilles ont été formellement identifiées, a indiqué le bureau du médecin-légiste.

gp

21. Changer d’époque. Le pétrole (lourd) pour faire rouler des voitures à pétrole à 30% de rendement, ça sert juste à insulter l’avenir. Rien de plus. Auj. avec 25 m² de solaire PV + de l’intelligence, on sait faire rouler un VE type smart ED à raison de 20 000 km/an. Au québec, avec des capacités hybdro-électriques installées délirantes, C le pays tout entier qui pourrait rouler à l’électrique. En investissant dans des réseaux intelligents et des infra de charges. Montréal commence à aller dans ce sens. Faut amplifier l’effort. Le pétrole, C le XXèmeS. C un truc de vieux. P.S : faudrait aussi que les constructeurs de VE fasent l’effort d’ajouter un système de chauffage dédié (bioéthanol) pour le marché québécois histiore d’éviter qu’en hiver, l’autonomie fonde comme neige au soleil (ah ah ah…) Vive le futru sobre & intelligent! A bas le passé archaïque & ringard.

Claude b.

Je crois que H-Q trouve qu’il est plus rentable de vendre l’électricité (aux US et autre provinces).