Un petit diamant industriel de quelques millimètres de côté pourrait permettre aux drones civils d’être rechargés en vol grâce à un laser. Ses propriétés offrent la possibilité de conserver la puissance du faisceau lumineux sur une longue distance afin d’alimenter des cellules photovoltaïques situées sur l’appareil.
Non dangereux pour la santé, ce système développé par LakeDiamond, spin-off de l’EPFL, peut également servir à la transmission d’énergie et de données vers des satellites. Il vient d’ailleurs d’être inclus dans les projets soutenus pour deux ans par le Swiss Space Office.
Les missions des drones se diversifient, leurs formes se perfectionnent, leur maniabilité se précise, mais leur point faible reste le même : leur autonomie. Les appareils à rotors, utilisés notamment pour des missions de surveillance dans des zones difficilement accessibles ou dangereuses, sont les plus mal lotis. Leurs moteurs, très gourmands en énergie, leur imposent encore actuellement un retour au sol après une quinzaine de minutes. Un moyen d’allonger le temps passé en l’air sans alourdir l’appareil est une alimentation à distance par laser orienté, grâce à un système de tracking, vers des cellules photovoltaïques placées sous le drone.
L’idée fait son chemin dans plusieurs laboratoires de la planète, notamment aux Etats-Unis, depuis quelques années. Mais grâce à son diamant industriel et son procédé de nanostructuration, une spin-off de l’EPFL, Lakediamond, rend possible l’utilisation d’un laser de forte puissance émettant à une longueur d’onde qui ne présente pas de risque pour la peau ou les yeux. Une condition indispensable si l’on entend utiliser ce système pour des drones civils.
Record du monde de puissance
Le système mis au point par la start-up de l’Innovation Park booste un laser d’une longueur d’onde non dangereuse (1,5 µm) pour qu’il parcourt une distance beaucoup plus élevée en conservant sa puissance. Contrairement à son apparence, un faisceau laser standard n’est pas si rectiligne qu’il y paraît. Au cours de sa trajectoire, il connaît une légère divergence qui induit une perte de densité qui croît avec la distance. « Les systèmes développés par d’autres entreprises ou laboratoires, souvent pour des applications militaires, ont donc pris le parti d’utiliser des lasers plus puissants, mais aussi plus risqués pour la santé en raison de la longueur d’onde utilisée», note Pascal Gallo, CEO dont la start-up a fait le choix inverse : transformer le rayon émis par une simple diode de faible intensité en un faisceau laser de grande qualité, d’un diamètre plus large et dont les rayons sont parallèles sur une distance plus importante. Il peut ainsi conserver ses propriétés sur plusieurs centaines de mètres.
Cette avancée technologique est possible grâce à un système particulier de laser où la lumière d’une diode est propulsée sur un « booster », composé d’une partie réfléchissante, d’un élément optique et d’une petite plaque de métal pour récupérer la chaleur. Ce procédé n’est pas nouveau, mais la puissance du faisceau à la sortie -plusieurs dizaines de watts- l’est. Le secret réside dans le petit carré de diamant, propulsé au rang de composant optique hors pair pour ce genre d’application. Le système détient en effet un record du monde pour une opération continue dans une longueur d’onde située au milieu de l’infrarouge : plus de 30 W en mode fondamental. « Cela correspond à environ 10’000 pointeurs laser » souligne le CEO.
La transparence et la conductivité thermique du petit joyau de laboratoire ainsi que la structuration de sa surface sont le fruit de plus de dix ans de recherches. Le procédé de dépôt en phase vapeur d’après lequel il est fabriqué, permet de maîtriser sa pureté et sa reproductibilité. Afin d’exploiter toutes les qualités de ce minuscule carré de carbone, sa surface est nanostructurée selon un savoir-faire développé au Laboratoire de Niels Quack à l’EPFL ». Grâce à la qualité du matériau et au traitement subi, le diamant laisse passer la chaleur vers une petite plaque de métal qui l’évacue, alors que ses propriétés optiques réfléchissent la lumière de manière à former un faisceau laser puissant.
« Pour augmenter la puissance, pour la recharge d’un drone plus gros par exemple, ces lasers peuvent facilement être placés en parallèle », souligne Nicolas Malpiece, responsable de la transmission d’energie chez LakeDiamond. Ce dispositif de recharge à distance fonctionne en laboratoire, mais devra subir encore quelques améliorations et développements avant d’alimenter les drones du quotidien. Notamment la question qui brûle certainement les lèvres du lecteur : que se passe-t-il lorsque le drone se retrouve derrière un obstacle et est ainsi découplé de sa base d’alimentation ? Plusieurs systèmes sont à l’heure actuelle envisagés. Une petite batterie de secours pourrait prendre le relais, ou, par exemple pour des missions de surveillance en zone dangereuse, le drone ressortirait de l’endroit où il se trouve et viendrait se mettre à une distance ad hoc de sa base pour « faire le plein ».
Ce système de transmission d’énergie est intéressant également pour d’autres domaines d’application. Il peut par exemple être utilisé pour la recharge et la transmission de données vers des satellites. Le développement du système est d’ailleurs inclus dans un programme de soutien du Swiss Space Office qui a débuté le 1er novembre et court sur deux ans.
Auteur: Cécilia Carron Source: Mediacom
Bonjour, la question de la dangerosité reste soulevée. L’ œil soumis à de l’infrarouge puissant subi des lésions irréversibles. 30 W c’est énorme ! cf par exemple : https://www.uvex-safety.com/blog/fr/2017-03-22/laser-risques-yeux-peau/
Je suis Innovation Park depuis leur tout début de je dois avouer qu’ils en ont fait du chemin. Félicitations pour l’excellent travail !
Nathan de Guide-Drones