Comment la radiation neutronique affecte-t-elle la durabilité du béton utilisé dans les centrales nucléaires ? Une question qui intrigue les scientifiques depuis des décennies. Des chercheurs de l’Université de Tokyo et d’ailleurs ont récemment apporté des réponses éclairantes sur les effets spécifiques de la radiation neutronique sur les propriétés structurelles du béton, ouvrant ainsi une nouvelle ère dans la compréhension de ce matériau essentiel.
Depuis longtemps, il est établi que la radiation affecte l’intégrité structurelle du béton. Toutefois, jusqu’à récemment, les détails précis de ces effets restaient inconnus. Des chercheurs, y compris ceux de l’Université de Tokyo, ont démontré que certaines propriétés du béton influencent ses caractéristiques structurelles sous divers niveaux de radiation neutronique. Par exemple, les cristaux de quartz présents dans le béton montrent une capacité à s’auto-réparer, ce qui pourrait permettre à certains réacteurs de fonctionner plus longtemps qu’on ne le pensait initialement possible.
Les incidents spectaculaires impliquant des centrales nucléaires suscitent naturellement des craintes. Cependant, de nombreuses personnes voient dans l’énergie nucléaire un pilier pour atteindre un monde carboné neutre. Cette vision met en lumière la nécessité d’améliorer la sécurité, la fiabilité, l’efficacité coût-bénéfice et d’autres aspects pour apaiser les peurs et accroître l’acceptation de cette technologie. Parmi les matériaux utilisés pour la construction de ces centrales, le béton joue un rôle clé en termes de sécurité et de longévité. Il est reconnu comme un matériau robuste, mais c’est seulement maintenant que les scientifiques peuvent explorer en profondeur comment la radiation neutronique des réacteurs affecte sa durabilité.
Les découvertes de l’équipe de recherche
Le professeur Ippei Maruyama du Département d’Architecture a expliqué : « Le béton est un matériau composite constitué de plusieurs composés. Ces composés peuvent varier selon divers facteurs, notamment la géographie locale, surtout l’agrégat rocheux qui constitue un composant majeur du béton. Or, la roche contient souvent du quartz. Comprendre comment le quartz se modifie sous différentes charges de radiation aide à prédire le comportement général du béton. »
Il a poursuivi en soulignant que la dégradation induite par la radiation neutronique représente un domaine d’étude particulièrement coûteux, rendant la recherche extensive difficile. Son équipe a abordé ce problème depuis 2008, en formulant des stratégies pour le résoudre à travers une consultation large de la littérature et des entretiens avec des experts, aboutissant à des expériences récentes utilisant la diffraction des rayons X pour observer des cristaux de quartz irradiés.
Maruyama et son équipe ont examiné deux aspects de la radiation neutronique : la dose totale reçue par les échantillons et le taux auquel ils la reçoivent, ou flux. Ils ont observé que pour une dose totale donnée, l’expansion d’un cristal de quartz était beaucoup plus importante lorsque le taux de dose était élevé. Cette découverte souligne non seulement la distorsion de la structure cristalline par la radiation, mais aussi un phénomène de récupération où les cristaux déformés pourraient se réparer, réduisant ainsi l’expansion.
Quelles implications pour l’avenir ?
« La découverte de l’effet du flux indique que non seulement la radiation neutronique déforme la structure cristalline, provoquant une amorphisation et une expansion, mais il existe aussi un phénomène où les cristaux déformés se rétablissent et l’expansion diminue », a ajouté Ippei Maruyama. « Nous avons également constaté que cet effet dépend de la taille des cristaux minéraux dans le béton. Les grains de cristaux plus grands montrent moins d’expansion, suggérant un effet dépendant de la taille. Compte tenu de ces résultats, la dégradation du béton due aux neutrons, qui est actuellement une préoccupation, pourrait impliquer moins d’expansion que prévu. Par conséquent, la dégradation pourrait être moins sévère que anticipée, permettant potentiellement aux centrales nucléaires de fonctionner plus en sécurité sur des périodes plus longues. »
L’équipe prévoit maintenant de relever plusieurs défis pour comprendre le comportement d’expansion des différents minéraux formateurs de roches, clarifier davantage les mécanismes d’expansion, et développer la capacité de prédire l’expansion des agrégats en fonction de leurs propriétés matérielles et des conditions environnementales. .
Légende illustration : Il s’agit en fait d’un plan du réacteur de recherche LVR-15 en République tchèque, où les expériences ont eu lieu. Les carrés rouges représentent les endroits où l’équipe a placé ses échantillons expérimentaux et d’autres appareils. Image au microscope électronique à balayage d’un agrégat Metachert, un analogue du béton, avant l’exposition au rayonnement neutronique (à gauche) et après (à droite). ©2025 Maruyama et al. CC-BY-ND
Article : ‘Neutron flux impact on rate of expansion of quartz’ / ( 10.1016/j.jnucmat.2025.155631 ) – University of Tokyo – Publication dans la revue Journal of Nuclear Materials