Les antennes jouent un rôle essentiel dans la transmission des ondes électromagnétiques, élément clé des technologies sans fil. L’évolution de ces technologies requiert des antennes toujours plus polyvalentes, robustes et faciles à fabriquer. Une équipe de scientifiques américains a exploré une approche novatrice inspirée du kirigami, art japonais ancestral de découpage et pliage du papier, pour concevoir la prochaine génération d’antennes.
Une étude a mis en lumière le potentiel du kirigami dans la fabrication d’antennes micro-ondes flexibles et ajustables. Les chercheurs ont réussi à transformer une simple feuille d’acétate recouverte d’encre conductrice MXene en une antenne tridimensionnelle dont la fréquence de transmission peut être modifiée par simple étirement ou compression.
Cette preuve de concept représente une avancée significative dans le domaine. Elle offre une méthode rapide et économique de fabrication d’antennes, en appliquant simplement de l’encre MXene aqueuse sur un substrat polymère élastique transparent.
Une approche inspirée de l’art japonais
Yury Gogotsi, professeur à l’Université Drexel et co-auteur de l’étude, a indiqué : «Pour que la technologie sans fil puisse soutenir les progrès dans des domaines tels que la robotique souple et l’aérospatiale, les antennes doivent être conçues pour offrir des performances ajustables et une facilité de fabrication».
Il a ajouté : «Le kirigami constitue un modèle naturel pour un processus de fabrication, en raison de la simplicité avec laquelle des formes 3D complexes peuvent être créées à partir d’une seule pièce de matériau 2D».
Contrairement aux antennes micro-ondes standard, dont la reconfiguration nécessite souvent l’ajout de circuits électroniques complexes, l’approche démontrée dans cette étude exploite le changement de forme physique. Cette méthode permet de créer des antennes dans une variété de formes et de configurations intriquées, tout en conservant flexibilité, légèreté et durabilité.
Pour fabriquer les antennes de test, les chercheurs ont d’abord enduit une feuille d’acétate d’une encre conductrice spéciale, composée de MXene de carbure de titane, pour créer des motifs sélectifs en fréquence. L’encre MXene s’avère particulièrement utile dans cette application en raison de sa composition chimique qui lui permet d’adhérer fortement au substrat, garantissant ainsi la durabilité de l’antenne.
Les MXenes, une famille de nanomatériaux bidimensionnels découverts par des chercheurs de Drexel en 2011, offrent des propriétés physiques et électrochimiques ajustables. Leur efficacité dans la transmission des ondes radio et leur capacité à bloquer ou permettre sélectivement la transmission des ondes électromagnétiques en font des candidats idéaux pour les applications de télécommunications.
Des résultats prometteurs
Les antennes kirigami se sont révélées efficaces pour transmettre des signaux dans trois bandes de fréquences micro-ondes couramment utilisées : 2-4 GHz, 4-8 GHz et 8-12 GHz. De plus, l’équipe a constaté que la modification de la géométrie et de l’orientation du substrat permettait de rediriger les ondes de chaque résonateur.
«Les surfaces sélectives en fréquence, comme ces antennes, sont des structures périodiques qui transmettent, réfléchissent ou absorbent sélectivement les ondes électromagnétiques à des fréquences spécifiques. Elles possèdent des structures actives et/ou passives et sont couramment utilisées dans des applications telles que les antennes, les radômes et les réflecteurs pour contrôler la direction de propagation des ondes dans la communication sans fil sur les plateformes 5G et au-delà» a ajouté Mohammad Zarifi, professeur associé à l’UBC et co-responsable de la recherche.
Ces résultats constituent une première étape vers l’intégration de ces composants dans des structures et des dispositifs sans fil pertinents. S’inspirant des multiples formes du kirigami, l’équipe cherchera désormais à optimiser les performances des antennes en explorant de nouvelles formes, substrats et mouvements.
Omid Niksan, chercheur de l’Université de Colombie-Britannique et auteur de l’article, a conclu : «Notre objectif était d’améliorer simultanément l’ajustabilité des performances des antennes et de créer un processus de fabrication simple pour de nouveaux composants micro-ondes en incorporant un nanomatériau MXene polyvalent avec des conceptions inspirées du kirigami. La prochaine phase de cette recherche explorera de nouveaux matériaux et géométries pour les antennes».
Légende illustration : Inspiré de l’ancien art japonais du kirigami, ce réseau d’antennes en matériau MXene a été créé par des chercheurs de l’université Drexel et de l’université de Colombie-Britannique. Crédit : Drexel University
Article : « MXene-based kirigami designs: showcasing reconfigurable frequency selectivity in microwave regime » – DOI: s41467-024-51853-1