La quête d’une énergie propre et abondante mobilise les scientifiques du monde entier. La fusion nucléaire, processus qui alimente les étoiles, représente un espoir pour répondre aux besoins énergétiques croissants de l’humanité. Sa maîtrise nécessite des collaborations internationales. Le Princeton Plasma Physics Laboratory (PPPL) aux États-Unis joue un rôle moteur dans ce domaine, notamment à travers son partenariat avec l’Université de Séville en Espagne pour développer un nouveau tokamak expérimental nommé SMART.
Le projet SMART (SMall Aspect Ratio Tokamak) bénéficie de l’expertise du PPPL en matière de codes informatiques, de systèmes magnétiques et de capteurs. Cette coopération illustre l’importance des efforts conjoints pour surmonter les défis de la fusion nucléaire.
Jack Berkery, directeur adjoint de la recherche pour le National Spherical Torus Experiment-Upgrade (NSTX-U) au PPPL et investigateur principal de la collaboration avec SMART, a commenté : «Le projet SMART exemplifie parfaitement notre travail collectif pour résoudre les problèmes posés par la fusion et former la prochaine génération à partir de nos acquis. Nous devons tous nous y mettre ensemble, sinon cela ne se produira pas.»
Les professeurs Manuel Garcia-Munoz et Eleonora Viezzer, co-responsables du laboratoire de science des plasmas et de technologie de fusion ainsi que du projet SMART à l’Université de Séville, ont choisi le PPPL comme partenaire idéal pour leur première expérience de tokamak.
SMART : un tokamak innovant à triangularité négative
Le tokamak SMART se distingue par sa forme sphérique et sa triangularité négative, une configuration unique qui pourrait offrir des avantages significatifs en termes de performance et de gestion de la chaleur. Garcia-Munoz a expliqué : «La triangularité négative présente un niveau inférieur de fluctuations à l’intérieur du plasma, mais dispose également d’une zone de divertor plus grande pour distribuer l’échappement de chaleur.»
La forme sphérique de SMART devrait permettre un meilleur confinement du plasma par rapport aux tokamaks en forme de donut. Cette géométrie particulière joue un rôle crucial dans le confinement du plasma, raison pour laquelle le NSTX-U, principal dispositif de fusion du PPPL, adopte également une forme plus arrondie.
L’expertise du PPPL en matière de simulation numérique s’est avérée déterminante pour le projet SMART. Le laboratoire américain a notamment aidé l’équipe espagnole à implémenter leur tokamak dans TRANSP, un logiciel de simulation développé et maintenu par le PPPL. Garcia-Munoz a souligné : «Le PPPL est un leader mondial dans de nombreux domaines, notamment la simulation de fusion ; TRANSP en est un excellent exemple.»
Stanley Kaye, directeur de recherche pour le NSTX-U, collabore actuellement avec Diego Jose Cruz-Zabala de l’équipe SMART pour déterminer les courants des bobines de mise en forme nécessaires à l’obtention des formes de plasma souhaitées, à triangularité positive et négative, lors des différentes phases de fonctionnement.
Conception de diagnostics pour le long terme
La collaboration entre SMART et le PPPL s’étend également au domaine des diagnostics, des dispositifs équipés de capteurs pour analyser le plasma. Plusieurs de ces diagnostics sont conçus par les chercheurs du PPPL.
Les physiciens Manjit Kaur et Ahmed Diallo du PPPL, en collaboration avec Eleonora Viezzer, dirigent la conception du diagnostic de diffusion Thomson de SMART. Ce système mesurera avec précision la température et la densité des électrons du plasma pendant les réactions de fusion.
Manjit Kaur a expliqué : «Ces diagnostics peuvent fonctionner pendant des décennies, donc lors de la conception du système, nous gardons cela à l’esprit.» L’équipe s’est assurée que le diagnostic pourra gérer les plages de température que SMART pourrait atteindre dans les prochaines décennies, et pas seulement les valeurs initiales plus basses.
D’autres diagnostics, tels qu’un système multi-énergie à rayons X mous (ME-SXR) et des spectromètres, sont également en cours de développement sous la direction de Luis Delgado-Aparicio, responsable des projets avancés au PPPL.
Vers le premier plasma de SMART
Les chercheurs de l’Université de Séville ont déjà effectué un test dans le tokamak, produisant la lueur rose caractéristique de l’argon chauffé par micro-ondes. Cette étape prépare les parois internes du tokamak à contenir un plasma beaucoup plus dense et sous haute pression.
Bien que techniquement cette lueur rose provienne d’un plasma, sa pression est si faible que les chercheurs ne le considèrent pas comme leur véritable premier plasma de tokamak. Garcia-Munoz a indiqué que celui-ci devrait être obtenu à l’automne 2024.
Le projet SMART illustre parfaitement l’importance de la collaboration internationale dans la recherche sur la fusion nucléaire. En combinant l’expertise du PPPL et de l’Université de Séville, cette initiative pourrait apporter des contributions significatives à la compréhension et à la maîtrise de cette technologie prometteuse pour l’avenir énergétique de notre planète.
Légende illustration : Le tokamak SMART (SMall Aspect Ratio Tokamak) est en cours de construction à l’université de Séville en Espagne, en collaboration avec le laboratoire de physique des plasmas de Princeton. Crédit : Université de Séville
Article : ‘Design of a Thomson scattering diagnostic for the SMall Aspect Ratio Tokamak (SMART)’ / ( 10.1063/5.0219308 ) – DOE/Princeton Plasma Physics Laboratory – Publication dans la revue Review of Scientific Instruments