Dans une analyse récente, l’astrophysicien de Harvard Avi Loeb met en lumière un paradoxe concernant le visiteur interstellaire 3I/ATLAS, dont les jets de matière défient les lois de la physique. Après avoir méthodiquement écarté les explications naturelles, le célèbre scientifique, connu pour ses hypothèses sur une potentielle origine technologique d’objets similaires comme ‘Oumuamua, conclut sur une piste plus spéculative. Un nouveau cas d’étude qui ne manquera pas d’animer le débat scientifique.
Un objet en rotation rapide ne peut logiquement produire des jets de matière parfaitement rectilignes. C’est pourtant ce que révèlent des images récentes de l’objet interstellaire 3I/ATLAS, créant une contradiction que l’astrophysicien décortique dans son dernier billet. En juillet et août 2025, il avait été établi que l’objet tournait sur lui-même en 16,16 heures. Or, une observation du 9 novembre par F. Niebling et M. Buechner (CF image illustration principale) montre des jets s’étendant sur plus d’un million de kilomètres avec une rectitude affirmée.
Normalement, la rotation aurait dû « maculer » ces éjections, leur donnant une forme de spirale. Avi Loeb souligne par ailleurs, à la vitesse estimée de 400 m/s, il faut un mois à la matière pour parcourir une telle distance. Comment, dès lors, les jets peuvent-ils maintenir une orientation fixe pendant que leur source accomplit des dizaines de rotations ?
Les hypothèses naturelles mises à l’épreuve
Dans son analyse, l’astrophysicien de Harvard passe en revue les explications conventionnelles pour les écarter une à une. L’idée que les dégazages aient pu freiner la rotation de l’objet est jugée improbable, car de tels phénomènes ont plutôt tendance à l’accélérer.
Une autre piste, celle d’un dégazage pulsé et synchronisé avec l’exposition au Soleil, est également invalidée. Un tel mécanisme créerait une série de bouffées de gaz, mais ne pourrait expliquer les jets observés pointant dans la direction opposée au Soleil, comme le montre une image de M. Jäger, G. Rhemann et E. Prosperi.
De même, l’hypothèse d’une désintégration de l’objet en plusieurs fragments est contredite par une observation de D. Jewitt et J. Luu montrant un noyau qui semble unique et intact.
L’ombre d’Oumuamua et la piste technologique
C’est après ce méthodique processus d’élimination qu’Avi Loeb introduit ce qu’il nomme une « possibilité plus spéculative ». Pour lui, si les jets maintiennent leur orientation, c’est peut-être parce qu’ils sont produits par des « propulseurs technologiques qui préservent une orientation globale à des fins de navigation ».
La conclusion, même présentée avec prudence, est la signature d’Avi Loeb. Elle fait directement écho à ses travaux sur ‘Oumuamua, le premier visiteur interstellaire détecté, pour lequel il avait déjà défendu l’idée d’une possible origine artificielle face à des anomalies inexpliquées. En appliquant une logique similaire à 3I/ATLAS, il place ce nouvel objet au centre du même débat : lorsque les phénomènes naturels connus ne suffisent plus, doit-on oser envisager la piste technologique ?
La position du scientifique ne fait pas l’unanimité dans la communauté scientifique, où beaucoup privilégient la recherche d’un mécanisme naturel encore inconnu. Mais avec 3I/ATLAS, il propose un nouvel argument à son dossier. L’attention se porte désormais sur les prochaines données observationnelles, qui seront majeures pour trancher, ou du moins pour orienter un débat qui dépasse la simple astronomie.
Les 12 anomalies de la comète 3I/ATLAS identifiées par Avi Loeb :
Anomalies orbitales et géométriques
- Trajectoire rétrograde alignée à 5 degrés près du plan écliptique (probabilité : 0,2%)
- Arrivée synchronisée pour passer près de Mars, Vénus et Jupiter tout en étant invisible depuis la Terre au périhélie (probabilité : 0,005%)
- Direction d’arrivée coïncidant à 9 degrés près avec le signal radio « Wow! » (probabilité : 0,6%)
Anomalies physiques
- Noyau environ un million de fois plus massif que 1I/’Oumuamua et mille fois plus que 2I/Borisov, avec une vitesse supérieure (probabilité : moins de 0,1%)
- Accélération non gravitationnelle nécessitant l’évaporation d’au moins 13% de sa masse, alors que l’objet semble intact
Anomalies de composition chimique
- Panache gazeux contenant beaucoup plus de nickel que de fer (comme les alliages industriels)
- Rapport nickel/cyanure plusieurs ordres de grandeur supérieur à toutes les comètes connues (probabilité : moins de 1%)
- Seulement 4% d’eau en masse dans le panache gazeux, alors que l’eau est le constituant principal des comètes classiques
Anomalies optiques et comportementales
- Jet orienté vers le Soleil (anti-queue) qui n’est pas une illusion optique de perspective
- Polarisation négative extrême, sans précédent pour toutes les comètes connues (probabilité : moins de 1%)
- Luminosité augmentant plus rapidement que toute comète connue près du périhélie, avec une couleur plus bleue que le Soleil
Anomalies des jets
- Jets nécessitant une surface irréaliste pour absorber assez de lumière solaire et sublimer la glace requise
- Jets très collimatés maintenant leur orientation sur un million de kilomètres malgré la rotation mesurée de l’objet
Source : Avi Loeb
