Dans les laboratoires du Département américain de l’Énergie (DOE), une batterie flotte au cœur d’un aimant supraconducteur. Les chercheurs retiennent leur souffle : pour la première fois, ils vont observer en direct le comportement des atomes à l’intérieur d’une batterie commerciale en fonctionnement.
La résonance magnétique nucléaire (RMN) fonctionne tel un microscope atomique. Un champ radio-fréquence excite les atomes de la batterie, puis un capteur ultra-sensible mesure l’énergie libérée lors de leur retour à l’état normal. «Notre technique permet d’observer la danse des atomes sans perturber leur chorégraphie naturelle», explique Evelyna Wang, auteure principale de l’étude.
Les anodes en silicium représentent l’avenir des batteries, offrant une capacité de stockage quatre fois supérieure au graphite traditionnel. Mais un phénomène complexe limite leur utilisation : pendant la charge, les atomes de lithium s’associent au silicium, provoquant un gonflement comparable à une éponge saturée d’eau.
L’équipe du laboratoire Argonne a suivi l’évolution des batteries pendant sept mois. «Notre méthode s’apparente à un film au ralenti montrant le voyage des atomes», précise Baris Key, chimiste du projet. Les chercheurs ont identifié la formation de composés lithium-silicium qui restent piégés dans l’anode, réduisant progressivement la capacité de la batterie.
L’ajout de sel de magnésium dans l’électrolyte a montré des résultats surprenants. Marco Rodrigues, membre de l’équipe, précise : «Le magnésium agit comme un agent libérateur, permettant aux atomes de lithium de se déplacer plus librement.» Une solution simple mais efficace pour prolonger la durée de vie des batteries.
La méthode développée utilise des batteries fabriquées selon les standards industriels. Les fabricants peuvent désormais analyser leurs produits dans des conditions réelles d’utilisation, sans altérer leur intégrité. Un avantage considérable pour accélérer le développement de nouvelles technologies.
La sensibilité de la RMN aux éléments légers (lithium, silicium, carbone, hydrogène) rend la technique applicable à de nombreuses technologies émergentes : batteries sodium-ion, électrolytes solides, et autres innovations en développement.
Les résultats publiés dans le « Journal of Power Sources » marquent le début d’une nouvelle ère dans l’analyse des batteries. La compréhension approfondie des mécanismes de vieillissement permettra d’optimiser les futures générations de véhicules électriques, contribuant ainsi à la transition énergétique mondiale.
Légende illustration : Cette image montre la sonde RMN (le cylindre métallique) et une cellule de batterie à petite échelle (le dispositif rectangulaire au-dessus de la sonde) utilisées dans l’étude d’Argonne. Crédit : Argonne National Laboratory.
Article : « Operando NMR characterization of cycled and calendar aged nanoparticulate silicon anodes for Li-ion batteries » – DOI : 10.1016/j.jpowsour.2024.234477