« L’objectif principal du projet est d’inclure un certain degré d’automatisation, afin qu’un opérateur puisse contrôler une petite flotte de 10 drones maximum en gérant une seule station au sol », explique Luis E. Moreno, coordinateur de LABYRINTH et chercheur au Robotics Lab de l’UC3M. « L’idée est de permettre à l’opérateur d’indiquerla mission à accomplir (par exemple, surveiller le trafic dans une certaine zone) et que le système convertisse automatiquement cette mission en un ensemble de routes que chaque drone doit exécuter, et ce en calculant des alternatives, si nécessaire, de manière automatique », explique-t-il. Outre la planification et le contrôle des routes, deux autres domaines technologiques font l’objet d’étude : les communications via les réseaux 5G (afin que les drones soient connectés à tout moment) et la sécurité informatique se trouvant derrière l’ensemble du système.
Les chercheurs ont déjà développé,dans un article publié dans le magazine Sensors, une première stratégie de planification de trajectoires et de prévention des collisions pour des essaims de drones dans des environnements tridimensionnels. Pour ce faire, ils ont d’abord conçu un modèle 3D qui simule un environnement urbain, où ils ont établi des zones de décollage et d’atterrissage, puis ils ont testé un algorithme de planification chargé de calculer des routes optimales et fluides pour un ensemble de drones. Enfin, ils ont mis en œuvre différentes mesures (vols à différentes altitudes, contrôle de la distance, etc.) pour parvenir à une stratégie permettant d’éviter les éventuelles collisions.
Les chercheurs du projet LABYRINTH développent ces technologies dans le cadre de U-Space, un nouveau système européen de gestion du trafic aérien des drones mené par l’initiative SESAR (Single European Sky ATM Research). Ce nouveau cadre est conçu pour intégrer les opérations de drones à basse altitude, en dessous de 120 mètres (400 pieds), de manière sûre et efficace dans l’espace aérien européen.
« Les contrôleurs aériens utilisent les systèmes ATM (Air Traffic Management) pour gérer la circulation des avions commerciaux en toute sécurité. De même, il est essentiel de développer un UTM (Unmanned Traffic Management) qui permette aux drones de partager l’espace aérien entre eux et avec d’autres aéronefs », explique un autre des scientifiques participant à ce projet, Francisco Valera, membre du NETCOM (Networks and Communications Services) de l’UC3M. Ce groupe de recherche, en collaboration avec Telefónica I+D et l’Institut IMDEA Networks, a récemment présenté une étude expérimentale dans le magazine Sensors sur l’utilisation des technologies cellulaires dans les réseaux de drones.
Applications possibles
Les drones peuvent être utiles dans différentes applications, commeles opérations de livraison et de transport de marchandises, de surveillance dans différents environnements ou l’accès à des endroits difficiles d’accès dans des situations d’urgence, par exemple. Toutefois, à ce jour, les inquiétudes relatives à la sécurité des vols ont limité leur utilisation et il est souvent illégal de les utiliser dans certaines zones publiques. On estime que d’ici 2035, environ 400 000 drones voleront en Europe. Le grand défi consistera donc à gérer en toute sécurité le trafic de drones dans les villes et autres zones sensibles à la saturation.
Les applications prévues dans le cadre du projet LABYRINTH concernent des environnements très différents en Espagne. Par exemple, des travaux sont menés en collaboration avec la Direction espagnole générale du trafic (DGT) sur l’utilisation d’essaims de drones pour améliorer le transport routier, en analysant des aspects tels que le contrôle de la vitesse, la mesure de la distance entre les véhicules, l’identification des plaques d’immatriculation et le suivi et l’assistance en cas d’accidents. Dans les aéroports, dans une autre initiative menée avec l’Institut national de technique aérospatiale (INTA), les drones sont destinés à être utilisés pour contrôler les accès non autorisés, examinerles pistes ou comme mesure de dissuasion contre les oiseaux. Et dans le cas de la gestion des urgences dans des scénarios de concentration de masses (tels que des concerts ou des événements sportifs), une collaboration avec SAMUR-Protection civile de Madrid a été mise en place dans les opérations de surveillance de pré-urgence (identification des voies d’évacuation, des points d’assistance médicale ou des zones à risque, le calcul des capacités de rues)et dans l’assistance aux opérations médicales (itinéraire le plus rapide vers l’incident, transport de matériel spécialisé ou de médicaments).
LABYRINTH (Ensuring drone traffic control and safety) est un projet financé par le programme H2020 de l’Union européenne (GA 861696) et coordonné par l’UC3M. Ce consortium de R&D+I est composé de 13 centres de recherche et de partenaires industriels de 5 pays (Allemagne, Autriche, Belgique, Espagne et Italie). Les institutions participantes en Espagne, outre l’UC3M, sont la Direction générale du trafic (DGT), l’Institut national de technique aérospatiale (INTA), le SAMUR-Protection civile de Madrid et les entreprises Expace on Board Systems, Inncome, PONS Seguridad Vial et Telefonica I+D. L’autorité portuaire de la mer Ligure occidentale (Italie), le Centre aérospatial allemand (DLR), l’Institut allemand de normalisation (DIN), l’Institut autrichien de technologie (AIT) et l’Organisation européenne pour la sécurité de la navigation aérienne (EUROCONTROL) font également partie du projet.