Les incendies de forêt géants qui ravagent régulièrement la Californie, l’Australie ou encore le bassin méditerranéen ont trouvé un nouvel adversaire : Rosy Shield, un dispositif biomimétique largué depuis les airs qui déploie une mousse biodégradable pour stopper la progression des flammes. Conçu par deux ingénieurs de l’Université Hacettepe, en Turquie, le système entend combler le laps de temps critique entre la détection d’un départ de feu et l’arrivée des secours au sol.
Grâce à une combinaison inédite d’autorotation inspirée de la graine d’érable et d’une réaction chimique hyper-volatile, la capsule génère une barrière protectrice trente fois supérieure à son volume initial. Si les premiers tests s’avèrent concluants, Rosy Shield pourrait rebattre les cartes de la lutte anti-incendie en misant sur la prévention plutôt que sur la suppression.
Une capsule qui imite la nature
À première vue, Rosy Shield ressemble à une simple goutte d’eau solidifiée. Cette forme, loin d’être anodine, assure une stabilité aérodynamique optimale lors du largage. Une fois libérée d’un avion ou d’un drone, la capsule déploie deux ailes qui se mettent à tournoyer à la manière d’un samares d’érable, ralentissant la chute pour garantir une dispersion précise de la mousse.
À l’intérieur, un piston à ressort maintient séparés un agent chimique sec et un liquide activateur. Dès que l’air ouvre complètement les ailes, un pion de verrouillage se détache ; le ressort propulse alors la poudre dans la chambre liquide. Le mélange déclenche une réaction « hyper-volumétrique » qui, en quelques secondes, fait exploser l’enveloppe en PHA (un plastique biodégradable) et libère la mousse ignifuge sur la végétation.

Contenir plutôt que combattre
Les concepteurs, Mustafa Bahadır Özten et Ezgi Semerci, estiment que l’échec des méthodes actuelles tient à leur caractère réactif : attendre que le brasier se déclare avant d’agir.
Dans leur fiche projet, ils soulignent : « au lieu de lutter contre l’incendie, nous devons contenir sa propagation. » Concrètement, leur approche consiste à projeter la mousse en amont du front de flammes pour empêcher toute propagation, un changement de paradigme qui pourrait se résumer ainsi : « Elle ne combat pas le feu là où il se trouve, mais le circonscrit stratégiquement là où il se trouvera, ce qui modifie fondamentalement l’approche de la suppression à celle du confinement. »
Un impact environnemental limité
Contrairement aux retardants chimiques traditionnels, souvent décriés pour la pollution des sols et des cours d’eau, la mousse d’APP (Ammonium Polyphosphate) de Rosy Shield se dégrade naturellement et agit même comme fertilisant. Quant à l’armature en aluminium, elle intègre une balise GPS résistante à la chaleur afin d’être récupérée et réutilisée après l’incendie ; une logique d’économie circulaire que ses concepteurs revendiquent.
« La principale différence technologique réside dans notre génération de mousse hyper-volumétrique, » rappellent-ils, insistant sur l’avantage logistique comme transporter une poudre légère plutôt qu’un liquide pré-mélangé qui permet à un avion de couvrir des lignes de défense plus longues en un seul vol.


De la simulation au terrain
À ce stade, Rosy Shield demeure un prototype validé en laboratoire. L’équipe cherche désormais des financements pour passer aux essais grandeur nature. Ils viseront à affiner le chronométrage du piston, à optimiser la densité de mousse et à tester la résistance de la coque lors de largages répétés. Sur le long terme, les ingénieurs envisagent un essaim de drones autonomes capable d’anticiper la trajectoire des feux grâce à l’apprentissage automatique.
Si les essais en plein champ confirment les résultats annoncés, cette « barrière de mousse » pourrait devenir un outil précieux pour gagner la bataille des minutes qui précèdent l’embrasement généralisé.