Le réchauffement climatique et les questions environnementales sont devenus des sujets majeurs. Au cœur de ces débats, une équipe de recherche conjointe de l’Université de la ville de Hong Kong (CityU) et d’autres collaborateurs ont récemment mis au point un système photocatalytique artificiel stable, plus performant que la photosynthèse naturelle.
Ce système reproduit la structure d’un chloroplaste naturel et convertit le dioxyde de carbone présent dans l’eau en méthane, un combustible précieux, très efficacement à l’aide de la lumière. Ce projet de recherche ouvre une voie prometteuse vers l’atteinte de la neutralité carbone.
La photosynthèse artificielle, un enjeu majeur
La photosynthèse est le processus par lequel les chloroplastes des plantes et de certains organismes utilisent la lumière du soleil, l’eau et le dioxyde de carbone pour créer de la nourriture ou de l’énergie. Au fil des décennies, de nombreux scientifiques ont tenté de développer des processus de photosynthèse artificielle pour transformer le dioxyde de carbone en combustible neutre en carbone.
« Cependant, il est difficile de convertir le dioxyde de carbone dans l’eau, car de nombreux photosensibilisateurs ou catalyseurs se dégradent dans l’eau », a expliqué le professeur Ye Ruquan, professeur associé au Département de chimie de CityU, l’un des responsables de cette étude conjointe. « Bien que les cycles photocatalytiques artificiels aient montré une efficacité intrinsèque plus élevée, la faible sélectivité et la stabilité dans l’eau pour la réduction du dioxyde de carbone ont entravé leurs applications pratiques. »
Un système innovant inspiré de la nature
Dans cette dernière étude, l’équipe de recherche conjointe de CityU, de l’Université de Hong Kong (HKU), de l’Université Jiangsu et de l’Institut de chimie organique de Shanghai de l’Académie des sciences chinoises a surmonté ces difficultés en utilisant une approche d’assemblage supramoléculaire pour créer un système de photosynthèse artificielle. Il reproduit la structure des chromatophores (c’est-à-dire les cellules qui contiennent du pigment) des bactéries pourpres, qui sont très efficaces pour transférer l’énergie du soleil.
Le cœur du nouveau système de photosynthèse artificielle est une nanomicelle artificielle très stable – une sorte de polymère qui peut s’auto-assembler dans l’eau, avec une extrémité qui aime l’eau (hydrophile) et une extrémité qui la craint (hydrophobe).
La tête hydrophile de la nanomicelle fonctionne comme un photosensibilisateur pour absorber la lumière du soleil, et sa queue hydrophobe agit comme un inducteur pour l’auto-assemblage. Lorsqu’elle est placée dans l’eau, les nanomicelles s’auto-assemblent en raison des liaisons hydrogène intermoléculaires entre les molécules d’eau et les queues.
L’ajout d’un catalyseur au cobalt entraîne la production de photocatalyse d’hydrogène et la réduction du dioxyde de carbone, ce qui aboutit à la production d’hydrogène et de méthane.
Un taux de production de méthane impressionnant
En utilisant des techniques d’imagerie avancées et de la spectroscopie ultra-rapide, l’équipe a dévoilé les caractéristiques atomiques du photosensibilisateur innovant. Ils ont découvert que la structure spéciale de la tête hydrophile de la nanomicelle, associée à la liaison hydrogène entre les molécules d’eau et la queue de la nanomicelle, en fait un photosensibilisateur artificiel stable et compatible avec l’eau, résolvant le problème classique d’instabilité et d’incompatibilité avec l’eau de la photosynthèse artificielle.
L’interaction électrostatique entre le photosensibilisateur et le catalyseur de cobalt, ainsi que l’effet d’antenne de collecte de lumière fort de la nanomicelle, ont amélioré le processus photocatalytique.
Lors de l’expérience, l’équipe a constaté que le taux de production de méthane était supérieur à 13 000 μmol h−1 g−1, avec un rendement quantique de 5,6% sur 24 heures. Il a également atteint un taux d’efficacité solaire vers le combustible de 15%, surpassant la photosynthèse naturelle.
Une solution économique et durable
Plus important encore, le nouveau système photocatalytique artificiel est économiquement viable et durable, car il ne dépend pas de métaux précieux coûteux. « L’auto-assemblage hiérarchique du système offre une stratégie prometteuse de bas en haut pour créer un système photocatalytique artificiel à haute performance contrôlé de manière précise, basé sur des éléments abondants et bon marché sur Terre, comme les complexes de porphyrine de zinc et de cobalt », a commenté le professeur Ye.
Le professeur Ye a indiqué qu’il croit que cette dernière découverte bénéficiera et inspirera la conception rationnelle de futurs systèmes photocatalytiques pour la conversion et la réduction du dioxyde de carbone à l’aide de l’énergie solaire, contribuant à l’objectif de la neutralité carbone.
En synthèse
L’équipe de recherche a réussi à créer un système de photosynthèse artificielle surpassant la photosynthèse naturelle en matière d’efficacité. Ce système est non seulement stable et efficace mais également économiquement viable, car il n’est pas dépendant de métaux précieux. Avec un taux de production de méthane impressionnant, ce système de photosynthèse artificielle représente une avancée majeure dans la recherche d’une solution durable et rentable pour atteindre la neutralité carbone.
Pour une meilleure compréhension
- Qu’est-ce que la photosynthèse artificielle ? C’est un processus qui vise à reproduire de manière synthétique la photosynthèse naturelle, soit la transformation du dioxyde de carbone en énergie ou en nourriture grâce à la lumière du soleil.
- Comment fonctionne le système de photosynthèse artificielle créé par l’équipe de recherche ? Le système s’appuie sur une nanomicelle artificielle qui s’auto-assemble dans l’eau. Cette nanomicelle absorbe la lumière du soleil et, en présence d’un catalyseur au cobalt, entraîne la production de photocatalyse d’hydrogène et la réduction du dioxyde de carbone, ce qui aboutit à la production d’hydrogène et de méthane.
- Quels sont les avantages de ce système ? Le système est plus efficace que la photosynthèse naturelle et ne dépend pas de métaux précieux coûteux, ce qui en fait une solution viable économiquement. De plus, il représente une avancée importante dans la recherche d’une solution durable pour atteindre la neutralité carbone.
Les résultats ont été publiés dans la revue scientifique « Nature Catalysis » sous le titre « Artificial spherical chromatophore nanomicelles for selective CO2 reduction in water » (nanomicelles sphériques artificielles pour la réduction sélective du CO2 dans l’eau). 10.1038/s41929-023-00962-z
Légende illustration principale : Le professeur Ye Ruquan (premier rang, au centre), professeur associé au département de chimie, et son équipe de recherche à la City University of Hong Kong. Credit : City University of Hong Kong