Diagnostic énergétique : “le caractère folklorique des prestations”

En réactualisant son enquête sur les Diagnostics de Performance Energétique (DPE) l’UFC-Que Choisir se dit indigné de leur "manque criant de fiabilité" et "exige du gouvernement qu’il renforce sans délai leur cadre juridique."

Ainsi, après les annonces fin 2011 de réforme du DPE par le gouvernement suite aux enquêtes "accablantes" de l’UFC-Que Choisir, l’association a voulu vérifier si ce marché s’était enfin assaini. Or, après avoir fait passer en juin dernier 5 diagnostiqueurs affiliés à des réseaux ou indépendants, dans 5 maisons situées aux quatre coins de la France, l’UFC-Que Choisir dénonce de nouveau "le caractère folklorique des prestations" :

3 classes énergétiques pour un même bien :

"Deux maisons ont été classées, selon les diagnostiqueurs, dans 3 classes énergétiques différentes, avec pour l’une d’entre elles, un grand écart de B à E inadmissible. En effet, la classe B, peu énergétivore, est tellement rare que les constructions récentes conformes à la règlementation thermique 2005 ne l’atteignent même pas. Or, cette maison date des années 1970. Les trois autres biens n’ont pas échappé au caractère aléatoire du classement, puisque chacun s’est vu attribué, selon les diagnostics, 2 classes différentes. Bien évidemment, le caractère farfelu du classement impacte les estimations de consommations qui varient ainsi, pour une même maison, du simple au double (105 et 241 kw/h), voire plus du triple (73 et 255 kw/h). Et cet effarant yo-yo estimatif se poursuit avec les évaluations de factures annuelles : de 1.366 à 4.154 euros pour un même bien, soit une différence de plus de 300%."

Des recommandations fantaisistes !

"Pourtant imposées par la réglementation, 2 diagnostiqueurs n’ont pas fait de recommandations de travaux d’économies d’énergie pour le logement visité. Pour le reste, quand les mêmes mesures ont été recommandées, on doit encore dénoncer l’élasticité des conclusions relatives au temps de retour sur investissement et aux crédits d’impôts : une chaudière moderne se rentabilise ainsi, en Loire Atlantique, en 5 ou plus de 15 ans et ne donne droit à rien ou 10 % de crédit d’impôt selon le diagnostiqueur… Preuve est faite que la formation des diagnostiqueurs, même réformée, est dramatiquement insuffisante !"

"Enfin, dans cette jungle estimative, le consommateur ne peut pas se fier au prix du diagnostic. Payer plus cher n’est pas une garantie : dans le Val d’Oise, un diagnostiqueur, parmi les plus onéreux, a bâclé le travail en quinze minutes en se limitant à visiter une seule pièce du bien."

"Ces biens tristes constats s’expliquent en partie par les délais supplémentaires obtenus par les professionnels pour l’effectivité de la nouvelle méthode de calcul annoncée en 2011 qui ne sera pleinement en vigueur qu’en janvier 2013. Mais en tout état de cause, même à cette date, les abus devraient, en l’absence d’action gouvernementale, perdurer. Faut-il en effet rappeler que le Diagnostic de Performance Energétique est le seul à ne pas avoir de valeur juridique, contrairement aux autres diagnostics exigés lors d’une transaction immobilière ? Comment admettre cette absence d’opposabilité alors même que le montant du prêt à taux zéro est conditionné à la classe énergétique du logement fournie par le diagnostic et que le futur bonus/malus sur l’énergie utilisera le Diagnostic de Performance Energétique afin de déterminer la fraction de malus qui pourra être déduite du loyer par le locataire."

Décidée à obtenir une réelle fiabilisation des DPE, dont la portée ne cesse de croître (prêt à taux zéro, tarification progressive de l’énergie), l’UFC-Que Choisir demande au gouvernement d’adopter sans délai de nouvelles mesures techniques pour fiabiliser les Diagnostics de Performance Energétique, notamment une meilleure formation et certification des diagnostiqueurs ainsi que de plus grands contrôles et sanctions de leurs obligations.

Par ailleurs, elle demande aussi de rendre immédiatement opposable le DPE au bailleur et au vendeur pour que la responsabilité du diagnostiqueur puisse être concrètement engagée en cas de diagnostic erroné.

"A défaut de ces indispensables mesures, la question du caractère obligatoire de ces diagnostics folkloriques devra être posée" a conclu l’association de défense des consommateurs.

(1) Les résultats complets sont publiés dans le numéro d’Octobre de Que Choisir

            

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cezorb

la tarification progressive de l’énergie… La solution, déréglémenter, cesser de créer des emplois subventionnés comme ces diagnostiqueurs. Laisser l’énergie à son vrai prix, comprenant tous les coûts aujourd’hui externalisés (assurance, démantèlement, déchets, émissions carbone etc.). Laisser le consommateur libre de faire son choix et le financer avec un prêt à taux zero. Même les plus démunis pourront le rembourser grâce aux économies générées. PS. Une pub sous l’article “DPE à prix cassés”… Il devrait plutôt communiquer sur “DPE favorable pour passoire énergétique” !

Stephane

L’image des DPE est vraiment de plus en plus déplorable. Pourtant la méthode de calcul utilsée par les diagnosticeurs (3CL) est en théorie précise. Il serait intéressant de creuser l’analyse plus profondément: – D’où proviennent les variations sur les diagnostics? – Est ce que le logiciel utilisé par le diagnosticeur a un impact sur les résultats? – Quels sont les éléments qui ont été relvés (ou non) par les diagnosticeurs? Pourquoi ne pas instaurer et imposer des bonnes pratiques? Il serait intéressant que le “client” (le locataire ou l’acheteur du bien par exemple) puisse analyser le degré de détail du diagnostic qui lui est présenté (est ce que les compositions des murs ont été prises en compte, est ce que les ouvrants ont été mesurés, quels type de masque solaires ont été définis ….). Tant que les diagnositcs garderont ce degré d’imprécision (300%!!) il sera impossible de leur attribuer une quelconque crédibitilié. Stéphane, Cythelia.

traonvouez

Dans l’existant, il existe les DPE obligatoires et les diagnostics énergétiques pas obligatoires; ces derniers peuvent se faire avec un moteur de calcul suivant la RTex , ou Règlement Thermique de l’Existant. Or ces logiciels nécessitent une pratique réelle et demandent de prendre en comple beaucoup de points. Cela occasionnent des surprises: le gain avec un programmateur de chauffage est très élevé, idem en remplaçant une VMC existante par un modèle récent hygro A ou B. Or dans ces deux cas la réalité des travaux changera peu de choses sur la facture de chauffage des occupants. On aura donc toujours des différences entre 2 DPE ou 2 audits.

Tech

Le DPE a été à sa création un générateur d ‘Impôts indirects. par celui qui nous disait ne pas vouloir augmenter les impôts, mais qui créait de nouvelles taxes ou ce “machin” le DPE, obligatoire mais non opposable! qui à chaque achat/vente immobilière apportait 19,6% de TVA dans les poches du fisc! nombre de DPE, se sont faits par téléphone, sans même un seul regard au batiment!!! mais les factures ont bien rapporté à l’état! la recette étant tellement bonne de créer de nouveaux contrôles obligatoires, sur un autre sujet, c’est le contrôle technique des motos qui pourrait faire rentrer son lot de TVA ;o) et quand les voitures seront électriques, ce sera le rendement de votre chargeur qui sera controlé puis vos pneus, ou votre mode de conduite, ou votre mode de cuisson, il faudra alors favoriser le “al dente” :o))

Guydegif(91)

Il faudrait instaurer un DPE digne de ce nom avec des diagnostiqueurs formés, qualifiés, avec certificat d’aptitude à la clé, et pourquoi pas ”assermentés”, pour éviter le délire et le scandale décrits ci-dessus! Qu’attend-on pour mettre en place un DPE similaire au Contrôle Technique des automobiles, avec une Check List de points de test, des critères quantitatifs suite à des MESURES concrètes, et OBLIGATION de mettre en conformité AVANT une vente, par ex ! et CONTRE-VISITE pour vérifier si fait ! Voilà qui mettrait un peu d’ordre et de respect pour les intéressés (vendeurs comme acheteurs d’un bien) et éviterait les pratiques de certains opportunistes un peu mafieux! A+ Salutations Guydegif(91)

Pascal85

Bonjour Pour rappel, l’utilité du DPE avait pour but de comparer le classement énergétique entre logements proposés à la vente ou à la location. Parallèlement à cet information vis-à-vis des consommateurs, l’Etat avait dans l’idée d’instaurer une taxe carbonne. De ces besoins d’information, l’Etat a pondu un outil qui devait être simple pour être peu coûteux pour le consommateur. Cela a donné lieu à l’algorithme 3CL qui a été utilisé de 2007 à 2012. Cet algorithme est en train de faire un lifting pour “fiabiliser” le calcul et sera utilisé à partir du 1er janvier 2013 (en théorie, mais rien n’est prêt pour cela). Le manque de fiabilité du DPE vient d’abord des opérateurs. Pour prendre toutes les informations d’une petite maison, il faut compter 1 heure. Il est évident qu’un DPE téléphonique ou un opérateur qui reste 15 minutes sur place ne fait pas son travail comme il faut et qu’il mériterait d’être sanctionné. Mais le problème est plus profond que la simple “légèreté” de certiains opérateurs, avec notamment les pressions exercées par les agences immobilières qui mettent “une saine pression” pour avoir des DPE les plus favorables, sans compter les particuliers qui appellaient les diagnostiqueurs pour avoir un classement en D pour permettre l’accès au prêt à taux zéro. Heureusement le PTZ n’est plus assujéttis au DPE depuis qq mois, et on n’a plus de demande de DPE bidonné. Clairement, le problème ne vient pas du manque de qualification puisque tous les opérateurs sont certifiés (et l’Etat n’a de cesse de nous rappeler tous les bienfaits de la certification). Bon il y a bien quelques opérateurs qui n’ont rien à faire dans ce métier technique, parce que cela n’a jamais été leur domaine et que Pole Emploi les a malencontreusement orienté dans cette filière. Le problème, c’est le manque de rentabilité de ce secteur pousse à tous les extrèmes : commissionnement des agences immo et autres donneurs d’ordre, tarifs raz les paquerettes, maximum de missions (donc inspection bâclée), guerre tarifaire suicidaire. Au bilan, les diagnostiqueurs sérieux ont beaucoup de mal à travailler “au juste prix” et disparaissent petit à petit en laissant sur le marché des vendeurs de diag low cost et suffisamment structurés pour affronter la crise actuelle (franchises, grands groupes de bureau de contrôle)… mais pas plus fiables pour autant ! L’opposabilité du DPE ne servirait à rien. Du reste, il y a déjà eu des jugements sur des DPE bâclés avec mise en cause du diagnostiqueur (AlloDiagnostic). La non-opposabilité ne dispense donc pas d’une certaine responsabilité. La fiabilité du système pourrait se faire facilement par des contrôles de la Répression des Fraudes en sélectionnant les annonces immobilères “fantaisistes” dans leur classement. Mais ce type d’action n’est que trop rare. Et c’est dommage pour tout le monde à commencer par les diagnostiqueurs qui souffrent de cette image pourrie que les médias ne cesse de véhiculer, mais sans chercher à comprendre les tenants et les aboutissants. Cordialement Pascal BRUEL (diagnostiqueur en colère)